Édito

César 2020, édition politique

César 2020, édition politique
Polémique Polanski, démission du conseil d'administration de l'Académie: la cérémonie des César vendredi prochain se déroulera dans un contexte bouillonnant. KEYSTONE
Cérémonie

Que se passe-t-il aux César? Fin janvier, l’annonce des douze nominations pour J’accuse – favori devant Les Misérables et Portrait de la jeune fille en feu (onze et dix nominations) – relançait la polémique Polanski. Pas de «positions morales» aux César, répliquait Alain Terzian, président de l’Académie, qui promettait par ailleurs d’instaurer la parité dans ses rangs (35 % de femmes aujourd’hui). Quelques jours plus tard, 400 de ses membres (dont le comédien Omar Sy et la cinéaste Céline Sciamma) dénonçaient dans Le Monde le fonctionnement «élitiste et fermé» de l’Académie. Cette tribune a conduit à la démission surprise de son conseil d’administration, le 13 février dernier, à quinze jours de la cérémonie qui se tiendra vendredi.

Si elle a souvent servi de caisse de résonance à diverses polémiques, la traditionnelle remise de prix revêt cette année des enjeux inédits. Elle cristallise des questions sociales et politiques très actuelles, qui agitent entre autres le petit monde du cinéma, en France comme ailleurs. Les douze nominations pour J’accuse, résultat du vote des quelque 4700 membres de l’Académie, témoignent du soutien dont bénéficie encore son réalisateur, dans un milieu qui a attendu les révélations de la comédienne Adèle Haenel pour prendre enfin la mesure du mouvement MeToo. La tribune du Monde pointe en outre le manque de parité et de diversité au sein de l’Académie – comme à Cannes (épinglé pour sa compétition où les réalisatrices sont rares) ou à Hollywood (avec la fronde Oscar So White). En clair, les critiques se multiplient contre un cinéma français trop blanc, masculin et bourgeois, peu représentatif de la société.

La 45e cérémonie des César offrira l’occasion, pour la «grande famille» du cinéma français, de laver son linge sale en public. Car ces questions vont certainement peser sur le vote des Académiciens, conférant une dimension symbolique au palmarès. On y verra les signes d’une prise de conscience salutaire ou d’un aveuglement réactionnaire. Dans les catégories reines du meilleur long métrage et de la meilleure réalisation, les gagnants seront-ils Polanski et son plaidoyer pro domo, Sciamma et son manifeste féministe ou Ladj Ly et son film de banlieue? Adèle Haenel sera-t-elle sacrée meilleure actrice? Les «professionnels de la profession» distingueront-ils Grâce à Dieu ou Les Eblouis, qui condamnent les abus sexuels au sein de l’Eglise catholique, alors qu’ils séparent l’homme de l’artiste quand l’un des leurs est accusé? Qui montera sur scène et pour tenir quels discours? Réponses dans quatre jours…

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