Les taxis demandent la suspension d’Uber
Alors que les négociations tripartites entre Uber, le Canton, les syndicats et les chauffeurs n’ont pas abouti, les taxis redonnent de la voix. Dans une lettre datée de mercredi, Jacques Roulet, leur avocat, demande à la conseillère d’Etat Fabienne Fischer de suspendre les activités d’Uber et de son sous-traitant Mitc Mobility au 15 octobre, date butoir pour trouver un accord quant à la mise en œuvre de l’arrêt du Tribunal fédéral. Il explique pourquoi au Courrier.
Pourquoi cette demande?
Jacques Roulet: Mme Fischer a conditionné la reprise de l’activité d’Uber à sa mise en conformité avec l’arrêt du Tribunal fédéral. Or ce n’est pas le cas. On ne peut pas donner des sursis de semaine en semaine et ne rien obtenir du tout. Mme Fischer a indiqué qu’elle quittait son rôle de médiatrice pour reprendre celui d’autorité. Je n’attends pas qu’elle dise combien Uber et Mitc doivent verser d’arriérés de salaire et de charges, mais qu’elle constate que n’étant pas à jour avec leurs obligations, elles n’ont plus le droit d’exercer, comme le prévoit la loi sur les taxis et VTC.
Les taxis n’ont-ils pas tout intérêt à ce que Uber soit mis sur la touche?
Si ce n’était pas Uber, ce serait un autre. Les taxis se sont faits à l’idée de l’existence des VTC. Le problème, c’est qu’on joue dans la même cour, mais pas avec les mêmes règles. Si demain Uber doit payer ses chauffeurs 8heures par jour à 23,27 francs de l’heure, les VTC ne seront pas moins chers que les taxis. C’est comme si j’arrêtais de payer charges sociales et impôts: je serais l’avocat le meilleur marché de Genève.
A l’instar des syndicats et de Mauro Poggia, vous estimez que le temps d’attente et de retour des chauffeurs VTC doit être rémunéré. Pourquoi ?
Je ne l’ai pas inventé, cela figure dans le contrat de travail, en Suisse et en Europe: le travailleur est payé dès qu’il est à disposition de son employeur. Le risque économique doit être pris par ce dernier, qu’un client vienne ou ne vienne pas. C’est assez fou de constater que quatre mois après l’arrêt du TF, l’Ocirt n’a toujours pas réussi à se déterminer sur cette question et laisse Mitc poursuivre avec le travail sur appel.
Les chauffeurs membres des syndicats SIT et Unia ont refusé la proposition d’accord mise sur la table par Uber. Votre analyse?
C’est heureux qu’ils ne se soient pas laissés manipuler car les chiffres dont a parlé Le Courrier sont éloignés de toute réalité. Si on prend les charges sociales de 1000 chauffeurs, soit 20% de leur salaire, pendant cinq ans, à raison d’un revenu minimum de 4000 francs par mois, on arrive déjà à 40 millions. Alors même qu’il y a 1800 chauffeurs déclarés. Je déplore en outre un manque total de transparence. Je ne comprends pas comment l’Etat et les institutions sociales n’ont pas mis la main sur les données d’Uber. D’autant que nous savons, avec les Uber files, que parfois Uber a été capable d’effacer des données pour ne pas être inquiété.