Édito

Contre la course à l’échalote

Contre la course À l’Échalotte
Au-delà des finances, il faut se poser la question des risques les plus crédibles d’attaque en Suisse et de la réponse la mieux adaptée. KEYSTONE
Votations

Il y aurait mille autres débats à mener en priorité. Mais, tandis que la rue résonne des manifestations féministes, antiracistes ou pour la préservation du climat et que la pandémie mondiale de Covid nous questionne sur l’avenir social, économique et culturel du pays, il faut dire si oui ou non la Suisse investira 6 milliards de francs dans des avions de chasse. Un prix à quadrupler pour tenir compte des coûts d’entretien de ces engins, selon les opposant-es.

Ne nous le cachons pas: un Etat souverain crédible a besoin de mener des missions de police de l’air. Avec les organisations internationales qu’elle accueille, la Suisse doit assumer cette responsabilité et faire montre d’un minimum d’indépendance. Mais il est question, dans le vote du 27 septembre, d’acheter des avions de guerre, bardés d’équipements de haute technologie pour appuyer des combats au sol… Et, quel que soit le résultat du 27, l’armée suisse prendra du muscle car ses programmes d’armement prévoient une batterie de missiles sol-air et de drones achetés à Israël – dont l’industrie teste une partie de son matériel en Cisjordanie au mépris du droit international. D’ailleurs, 2,4 des 6 milliards sur lesquels les Suisses s’exprimeront sont déjà alloués au budget de l’armée. Une perte raisonnable en comparaison des 24 milliards que coûterait au final l’achat de 40 appareils envisagé par la Confédération.

Au-delà des finances, il y a la question des risques les plus crédibles d’attaque en Suisse et de la réponse la mieux adaptée. Observons que les flottes aériennes française ou étasunienne n’ont été d’aucun secours face aux attaques terroristes subies ces vingt dernières années par ces pays. On voit aussi mal ce que des avions de chasse pourraient produire comme effet contre les cyber-attaques, qui auraient la capacité de paralyser un pays entier. Sans parler du dérèglement climatique, qui reste la menace la plus urgente pesant sur le vivant à l’échelle planétaire.

La Suisse ferait mieux d’accrocher ses espoirs ailleurs que dans quarante avions et de sortir de cette logique guerrière alimentée par la peur. Par sa neutralité affichée, sa tradition des bons offices et sa géographie entourée de pays amis, la Suisse pourrait se montrer en exemple de désescalade militaire. En 1989, l’initiative populaire du Groupe pour une Suisse sans armée (GSsA) marchait bien sur deux jambes: démilitarisation d’une part et politique globale de paix de l’autre. Plus que jamais, la Suisse a un rôle à jouer dans cette partition, en œuvrant activement à la paix plutôt qu’en salivant devant de mesquines affaires compensatoires à l’achat de nouveaux engins de mort.

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