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Apres l’écroulement de Bleu et Blanc, Netanyahou menace… sur sa droite

AU PIED DU MUR

En mars prochain, les Israélien·ne·s retourneront aux urnes pour la quatrième fois en deux ans, après la dissolution du parlement en décembre 2020. Par trois fois, la coalition d’extrême droite Likoud-orthodoxes n’a pas réussi à obtenir la majorité garantissant au premier ministre, Benyamin Netanyahou, l’immunité dans ses affaires de corruption – son unique centre d’intérêt.

N’ayant su tirer parti de sa victoire de mars 2020 pour éjecter le régime corrompu de la famille Netanyahou, la liste du centre Bleu et Blanc a préféré signer un accord d’union gouvernementale avec le Likoud au printemps dernier. Huit mois ont réussi à réduire cette coalition en poussière et à désespérer les centaines de milliers d’électeurs qui voulaient se débarrasser de Netanyahou. Il fallait toute la naïveté d’un Benny Gantz [dirigeant de Bleu Blanc et actuel ministre de la Défense] pour croire une seule seconde que le premier respecterait l’accord de rotation [prévoyant que Netanyahou lui cède son poste de premier ministre en novembre 2021]. Naïveté, ou alors, comme le laisse entendre l’ancien commandant de Gantz, Ehoud Barak, le fait d’être soumis à un chantage de la part de l’entourage du premier ministre. Quoi qu’il en soit, l’ancien chef d’état-major Gantz est du genre fort avec les faibles – la population civile de Gaza qu’il a écrasée sous les bombes – et faible avec les voyous. Il n’est pas exclu que dans deux mois sa liste ne passe pas la rampe pour obtenir des sièges.

Ces prochaines élections donneront lieu à une compétition entre différentes listes de droite. Le centre, majoritaire pendant plusieurs années, s’est suicidé et la gauche est réduite à sa plus petite dimension. Pour Netanyahou, la véritable menace émane d’une scission au sein du Likoud, menée par Gideon Saar. Membre de la vieille garde du parti et ancien ministre de l’Education nationale du gouvernement Netanyahou, ce dernier est loin d’être situé à gauche de l’actuel premier ministre. Il mènera campagne autour de la corruption d’un régime dirigé par des voyous.

Face à la menace que représentent Saar et les autres têtes de listes d’extrême droite – Naftali Benett et Avigdor Lieberman –, Netanyahou a un gros problème: il ne peut décemment (si ce mot a un sens pour le personnage) les accuser, comme il en a coutume face à ses divers adversaires politiques, d’être des gauchistes faisant le jeu des terroristes palestiniens. Qu’invente alors le champion de l’opportunisme politicien? Incroyable mais vrai, il se tourne vers l’électorat arabe! Effectuant un virage à 180 degrés, celui qui n’a cessé d’aiguillonner l’électorat juif contre la population arabe va parcourir les localités arabes et courtiser les politiciens arabes susceptibles d’être achetés. Une stratégie qui peut porter ses fruits, vu la crise que traverse la Liste [arabe] unifiée.

Une chose est sûre: quels que soient les résultats, la coalition qu’engendrera les prochaines élections ne marquera aucune amélioration du sort de la population palestinienne, ni dans les territoires occupés ni au sein d’Israël. Et ce n’est pas du côté des divers régimes arabes – qui, du Maroc à Dubaï, se livrent à une concurrence effrénée à qui normalisera davantage ses relations avec l’Etat juif – que viendra le salut.

Notre chroniqueur est militant anticolonialiste israélien, fondateur du Centre d’information alternative (Jérusalem/Bethléem).

Opinions Chroniques Michel Warschawski

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lundi 8 janvier 2018

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