Édito

L’armement ne connaît pas la crise

L’armement ne connaît pas la crise
KEYSTONE/Alessandro della Valle
Armement

Ma petite entreprise ne connaît pas la crise. Pandémie du Covid oblige, les exportations suisses ont reculé l’an passé de 4%. Mais il est un secteur qui se porte à merveille: les exportations d’armes qui ont, elles, connu une croissance record de 24% par rapport à 2019.

Des chiffres contenus dans le rapport annuel du Seco (Secrétariat fédéral à l’économie), l’organisme chargé de délivrer les autorisations dans ce secteur régulé du commerce.

Jamais la Suisse n’avait exporté autant d’armes qu’en 2020, relève le Groupe pour une Suisse sans armée (GSsA) en réaction à ces statistiques annuelles du Seco. Le volume d’exportations lors de l’exercice écoulé dépasse même l’année 2011 qui était pourtant considérée, avec 874 millions de francs, comme un optimum.

Alors, oui, une bonne partie de ces exportations va vers des pays a priori peu problématiques, comme le Danemark ou l’Allemagne. Cela n’ôte rien au côté immoral de ce douteux commerce de mort. Et surtout, en troisième position, on trouve déjà l’Indonésie, régulièrement critiquée pour son régime autoritaire et ses violations graves des droits humains, puis, assez rapidement, le Brésil de Bolsonaro. Pas précisément des démocraties modèles. Et surtout, on constate que la Suisse exporte vers des pays impliqués dans la sale guerre du Yémen, Emirats arabes unis, Bahreïn, Koweït et Arabie saoudite.

Bref, on constate une nouvelle fois qu’il y a des trous dans les mailles du filet censées empêcher les exportations d’armes vers des pays impliqués dans des conflits. La bonne nouvelle étant que, pour préoccupant qu’il soit, ce trafic est marginal. Il ne représente que 0,3% des exportations suisses, selon les chiffres du Seco. Il serait donc tout à fait loisible d’y renoncer et de faire prédominer l’éthique sur le profit.

Des données utiles à garder en mémoire lorsque que l’initiative dite «correctrice», lancée par les milieux pacifistes et visant à mettre fin à certains abus en la matière, reviendra devant le peuple. Non seulement il est souhaitable de mieux réguler la vente de ces engins de mort, mais cela est possible. Et sans dommages collatéraux marqués au niveau de l’emploi. Il sera bon de s’en souvenir lorsque les milieux affairistes tenteront de faire pleurer dans les chaumières en brandissant l’argument de la disparition des postes de travail pour justifier leurs trafics.

Leur seul moteur sera bien l’argent. Le leur.

Opinions Édito Philippe Bach Armement

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