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Les mots peuvent tuer

Les mots peuvent tuer
"Des pensees contre l'homophobie et la transphobie", flashmob contre l'homophobie réalisée par l'artiste Paul Harfleet à Genève, mai 2017. KEYSTONE
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L’homophobie n’est pas une opinion. C’est une insulte jetée à la figure de certaines personnes pour ce qu’elles sont. Le 9 février, les Suisses diront s’ils et elles acceptent l’extension de la norme antiraciste aux propos discriminants ou insultants envers les personnes gays, lesbiennes ou bisexuelles.

Des milieux bigots se référant de manière littérale à la Bible (l’Union démocratique fédérale) ou pratiquant une politique volontiers stigmatisante (l’UDC a toujours eu l’article antiraciste dans le collimateur) ont lancé un référendum contre ce projet de loi qui, pourtant, va de soi. Fort heureusement, les sondages montrent que la question a été bien comprise par l’électorat. La loi devrait être largement acceptée. Ce qui est une bonne nouvelle.

Pour la société, tout d’abord. Cette disposition est la manifestation politique et l’expression symbolique de valeurs fondamentales: respect de la dignité humaine et des différences, refus des discriminations. Elle constitue ensuite un rempart légal bienvenu. Insulter n’est pas anodin. Les mots peuvent tuer. A force de vilipender certaines personnes, d’aucuns se sentent autorisés voire poussés à passer à l’acte. Régulièrement, des couples d’homos ou de lesbiennes se font tabasser. Ces actes sont évidemment déjà interdits par la loi, mais il n’est pas inutile d’y inclure une disposition permettant de les prévenir.

Aux Etats-Unis, où tout ou presque est permis en termes de propos dévalorisants au nom du premier amendement, il est intéressant d’observer un moment de flottement lors de chaque passage à l’acte contre une synagogue, une mosquée ou une boîte gay.

Affirmer que cette nouvelle norme pénale restreindrait la liberté d’expression est une contre-vérité. Personne ne dénie aux créationnistes de penser que le monde a été créé en six jours. Et les propos de bistrot ne sont pas concernés.

C’est à la fois le mérite et le défaut de la loi: inutile d’un attendre trop. L’application de la loi antiraciste nous le rappelle: n’ont été condamnés que quelques vraies crapules négationnistes ratiocinantes, et quelques cas de discriminations raciales crasses. Cet article ne fera pas disparaître l’homophobie, et gageons que les poursuites seront ardues. Mais il permettra à l’avenir de condamner cette directrice de crèche qui a récemment refusé un enfant d’un couple de même sexe en arguant que cette constellation familiale ne serait «ni normale, ni naturelle». Qui peut douter que cela constitue un progrès?

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