La cour retoque la loi sur la laïcité
La liberté de religion est un droit fondamental garanti par la Constitution suisse. Et les parlementaires ne représentent pas l’Etat mais la société. La Chambre constitutionnelle genevoise a rappelé ces deux principes mardi, et admis partiellement six recours déposés. Elle annule une disposition importante de la loi sur la laïcité acceptée en votation populaire le 10 février dernier.
Il s’agit de l’alinéa qui interdit aux députés du Grand Conseil et des conseils municipaux de signaler leur appartenance religieuse par des propos ou des signes extérieurs, au nom de la neutralité de l’Etat. L’exécutif en revanche – conseillers d’Etat et conseillers administratifs –, continuera à devoir éviter tout pendentif coupable, de même que les magistrats du pouvoir judiciaire et les fonctionnaires en contact avec le public. Les référendaires pourraient bientôt annoncer un recours au Tribunal fédéral à ce sujet. La cour a aussi assoupli l’article interdisant les manifestations cultuelles dans le domaine public.
La vision selon laquelle les parlementaires représentent la société dans sa diversité plutôt que l’Etat l’emporte donc. N’en déplaise aux nostalgiques d’une identité nationale uniforme, les membres d’un parlement élu au suffrage universel sont «censés représenter différents courants d’opinions, y compris religieuses», rappelle la cour. Or la loi adoptée en février empêchait toute personne affichant une appartenance religieuse d’accéder à un mandat politique. Exit donc une députée portant un foulard ou un élu arborant une kippa. Dans une société pluraliste, ceux qui jugent intolérable d’interdire les signes religieux côtoient ceux qui n’y voient rien de grave. Or, quand l’enjeu est aussi faible (voire inexistant) en termes d’intérêt public, une interdiction ne sert qu’à créer des oppositions fondamentales sur des questions qui ne le sont pas.
Depuis la publication de l’arrêt de la Cour, certains fustigent des arrêts qui fouleraient aux pieds le vote de la population. C’est oublier que les premiers des six recours (des Verts et du Réseau évangélique) ont été annoncés très tôt et que nombre de votants ont soutenu la loi convaincus que ces alinéas liberticides seraient balayés au nom du principe supérieur mis en cause. C’est ce que vient de faire la justice genevoise, cohérente avec la défense intransigeante de la liberté de conscience que suit la jurisprudence suisse.