Édito

République en danger

République en danger
Le président Macron lors de l'hommage national à Samuel Paty à la Sorbonne, le 21 octobre. KEYSTONE
France

Il y a une semaine, la France affrontait un nouveau drame de l’extrémisme avec l’assassinat d’un enseignant à Conflans-Sainte-Honorine (Yvelines), décapité pour avoir thématisé avec ses élèves les caricatures de Mahomet. Une nouvelle fois, c’est l’école qui est visée, lieu de l’émancipation et de la pensée critique, instrument privilégié de la lutte contre les totalitarismes. «Faire des républicains, c’était le combat de Samuel Paty», prononçait le président français lors de l’hommage rendu mercredi à la Sorbonne. Mais est-ce vraiment encore le combat d’Emmanuel Macron?

Depuis une semaine, la France est le théâtre de déclarations odieuses ou délirantes. De la ridicule indignation du ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin effarouché par les «étals communautaires» au «problème avec la communauté tchétchène en France» de l’Insoumis Jean-Luc Mélenchon (il s’en est excusé depuis), à la «législation de guerre» réclamée par Marine Le Pen, la politique française nage en pleine confusion. L’unité nationale affichée après les attentats de Charlie Hebdo – actuellement jugés à Paris – a volé en éclats. L’instrumentalisation de l’émotion collective face à l’horreur de Conflans traverse l’ensemble du spectre politique. La xénophobie et l’islamophobie se sentent pousser des ailes.

Et les lignes ont déjà bougé: alors qu’en octobre 2019, le président expliquait encore que «le communautarisme, ça n’est pas le terrorisme», il jugerait désormais, rapporte Le Figaro, que «le séparatisme est bel et bien un terreau du terrorisme.»

Dont acte: le milieu associatif – que le projet de loi sur le séparatisme déclare courtisé par l’islamisme radical –, est visé, à l’image du Comité contre l’islamophobie en France (CCIF) ou de l’Observatoire de la laïcité. Diverses associations et individus ont été inquiétés à coup de visites domiciliaires. «La peur va changer de camp, a promis Emmanuel Macron tandis que le ministre de l’Intérieur veut «intimider et passer des messages».

Cette rhétorique de l’arbitraire n’a rien à faire avec les valeurs républicaines et l’Etat de droit que le président affirmait cet été encore. Année après année, la législation sécuritaire n’a fait qu’enfler en France, et sans rien empêcher. Cette voie-là n’est plus crédible, sapant certains principes fondamentaux des libertés démocratiques et aggravant les divisions qu’elle prétend combattre.

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