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L’«agrocolonialisme» doit cesser!

EST-CE BIEN RAISONNABLE?

A l’heure où des centaines de milliers de personnes, partout dans le monde, défilent pour la planète, alors que les conférences internationales consacrées au réchauffement climatique se multiplient, sur le continent africain, c’est business as usual. La ruée sur les terres agricoles ne connaît guère de trêve. De grands groupes agro-industriels, occidentaux, asiatiques, avec l’aimable complicité des gouvernements et des institutions financières internationales, continuent de faire main basse sur les terres des communautés, au profit de monocultures de palmiers à huile, accentuant encore davantage les changements climatiques dont l’Afrique ressent déjà dramatiquement les effets. C’est la double, triple, quadruple peine: les communautés rurales sont chassées de leurs terres, souvent manu militari, pour céder la place à des plantations industrielles qui répondent à la demande mondiale croissante en huile végétale bon marché, destinée à la production d’aliments transformés, de cosmétique, d’agrocarburants.

Le rapport que vient de publier l’ONG Grain, intitulé «En Afrique, les communautés résistent à l’accaparement des terres destinées à la production d’huile de palme», raconte avec force exemples à l’appui comment la Banque mondiale continue de jouer un rôle important dans l’expansion des plantations industrielles de palmiers à huile sur le continent africain, notamment via la Société financière internationale, ainsi que des institutions financières américaines, chinoises, européennes. Et comment la nouvelle vague de plantations industrielles qui s’est déroulée sur le continent africain au cours de ces quinze dernières années, opérée par des sociétés parapubliques, prétend agir au nom des intérêts nationaux.

Mais pour les populations des pays concernés – le Liberia, le Cameroun, la République démocratique du Congo, la Côte d’Ivoire, le Nigeria, etc. –, les projets actuels de plantations industrielles de palmiers à huile sont perçus comme «un nouveau cycle d’occupation coloniale», selon les témoignages recueillis par Grain. Leurs terres leur sont enlevées, souvent par la force, «sans consultation ni consentement» préalables. Les plantations industrielles «détruisent leurs forêts et la biodiversité locale» et polluent leurs ressources en eau. Paradoxe: il est en outre interdit à ces populations de produire leur propre huile de palme, de manière artisanale et traditionnelle, comme elles le font depuis ­toujours.

Face à cet «agrocolonialisme», qui, selon l’ONG, «se dissimule derrière un discours invoquant une mission d’aide à l’Afrique, comme cela se passait à l’époque coloniale», la résistance s’organise. La lutte des communautés, dans le sud-ouest du Cameroun, a ainsi contraint le gouvernement à faire marche arrière. La société étasunienne Herakles Farms, qui avait négocié une concession de 73 000 hectares, s’est retirée, tout comme d’autres investisseurs potentiels. D’autres villageois camerounais sont parvenus à stopper l’expansion de plantations industrielles et mènent un long combat pour récupérer leurs terres. Au Liberia aussi, la résistance des communautés s’opposant à des plantations industrielles a permis de dissuader des entreprises de poursuivre leurs investissements. Dans le contexte actuel, l’ONG Grain appelle à ce que les terres soient rendues aux communautés, afin qu’elles puissent y pratiquer une agriculture de proximité, axée sur les besoins des populations locales. Et de tourner définitivement la page des plantations coloniales sur le continent africain.

Notre chroniqueuse est journaliste.

Opinions Chroniques Catherine Morand

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lundi 8 janvier 2018

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