«Merci les jeunes!»
Samedi à Lausanne, en pleine manifestation pour le climat, le nobelisé vaudois Jacques Dubochet arborait en pancarte ce bref mais efficace témoignage de gratitude, probablement partagée par tous les adultes présents: «Merci les jeunes!» Un peu plus tard, sur les marches du palais de Rumine, devant 10 000 manifestants en bonne partie mineurs, l’énergique septuagénaire a noté que «c’est un événement historique pour l’humanité. (…) Depuis la fin de l’an passé, enfin, on sent que les choses bouillonnent.»
Car dans la foulée des actions radicales pour le moins inspirantes de l’ado suédoise Greta Thunberg, puis de la grève des écoliers du 18 janvier – elle a vu 22 000 jeunes descendre dans les rues du pays –, ce sont presque 40 000 personnes qui se sont mobilisées samedi, tous âges confondus. Avec la fierté, côté jeunesse, de faire taire les mauvaises langues, celles qui les soupçonnaient de débrayer dans la seule optique de sécher les cours.
Par rapport au mois dernier, la palette de slogans s’est encore enrichie, autour d’un constat de base demeuré identique: «Pourquoi étudier s’il n’y a pas d’avenir?» Imparable. A leur tour sur les marches de Rumine, plusieurs écoliers-étudiants ont martelé que les gestes individuels ne suffisent plus. Et que si la Suisse figure parmi les champions du monde du recyclage, ça ne sert pas à grand-chose puisque la Banque nationale, par ses choix d’investissements, génère autant de gaz à effet de serre que l’entier du pays. On a aussi rappelé que l’Helvétie est devenue ces dernières années la principale plaque tournante du négoce des matières premières, attirant fiscalement nombre de multinationales prédatrices de l’environnement et des droits humains.
«J’ai vécu les Trente Glorieuses pendant lesquelles se sont mises en place ces habitudes de consommations et de gaspillage qui sont aujourd’hui notre problème», a relevé Jacques Dubochet, invitant la jeunesse à voter. Sans pour autant donner de mots d’ordres partisans, alors qu’approche la campagne des élections fédérales. Mais personne dans les cortèges n’a oublié les ricanements moqueurs de plusieurs personnalités de droite, en marge du 18 janvier. Comment un véritable changement de paradigme pourrait-il venir de ce bord?
Après le succès de samedi, écoliers et étudiants annoncent un nouveau débrayage pour le vendredi 15 mars. On ne peut qu’espérer un élan de bon sens de la part des écoles, pour qu’aucun établissement ne sanctionne les grévistes et leur saine colère, celle qui les pousse à refuser la fatalité d’un futur sans avenir.