Édito

Priorités pacifistes

Priorités pacifistes
Bande de Gaza. KEYSTONE
Conflit

«L’armée, ça tue, ça pollue et ça rend con», proclame le fameux slogan du Groupe pour une Suisse sans armée. Le Courrier se penche dans cette édition sur la seconde de ces trois affirmations. Quel est l’impact environnemental de la guerre?

On s’en doute, il est considérable. Les exemples ne manquent pas. Les tonnes de défoliant déversées sur le Vietnam par les Etats-Unis, dans le but de détruire les espaces boisés propices à dissimuler «l’ennemi», sont là pour nous le rappeler. La dioxine est toujours présente dans les sols, continue d’exercer ses ravages, de tuer ou d’handicaper. L’usage de l’uranium appauvri – qui permet de percer des blindages – a été popularisé durant la première guerre du Golfe. On l’a revu en ex-Yougoslavie et sur la plupart des champs de bataille. Là aussi, on est face à des pollutions «durables».

Malheureusement, force est de constater que le tropisme est ancien. L’expression de «la politique de la terre brûlée» en est l’illustration. Les Romains rasaient déjà des forêts pour mieux traquer les peuples qu’ils entendaient soumettre. Le stratège chinois Sun Tzu évoque, cinq siècles avant notre ère, l’empoisonnement de puits et le détournement de rivières. Quand il s’agit de s’imposer par la force, l’imagination ne connaît pas de limites. Sauf que celles-ci existent et nous rattrapent. L’usage de l’arme atomique pour mettre fin à la Seconde Guerre mondiale en est la manifestation tangible. Pour la première fois peut-être, l’humanité put appréhender sa finitude.

En cela, un lien peut être tiré avec la crise climatique à laquelle nous sommes confronté·es. Le court terme – écraser l’ennemi, qu’il soit ukrainien ou gazaoui – prime toute prise en compte du long terme. Les ravages environnementaux passent au second plan, ou sont justifiés au nom d’objectifs prioritaires.

Qu’il s’agisse de la destruction systématique de la bande de Gaza – l’impact sur la nappe phréatique ne s’arrêtera pourtant pas à la frontière – ou les risques que fait porter la centrale nucléaire de Zaporijia en Ukraine sur toute l’Europe, c’est bien de la planète que nous comptons léguer à nos enfants dont il est question.

Face aux menaces d’un holocauste nucléaire, Albert Camus plaidait pour la paix, «le seul combat qui vaille d’être mené». Cette urgence est toujours aussi prégnante, près de quatre-vingts ans plus tard. Avec une urgence plus grande encore, vu le caractère inéluctable et l’inertie du risque climatique et environnemental.

Opinions Édito Philippe Bach Conflit

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