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Les droites et l’opposition

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Revenant sur une récente chronique d’Anne-Catherine Menétrey-Savary, Hans-Peter Renk détaille le résultat des élections législatives françaises de juin 1968 en soulignant que l’effet «raz-de-marée» gaulliste, largement amplifié par le mode de scrutin, n’était pas le reflet exact des forces politiques en présence.

Dans sa chronique «Le silence de la rue, le brouhaha des joutes électorales», Anne-Catherine Menétrey-Savary écrit ce qui suit à propos des élections de juin 1968 en France: «(…) Et ça marche. On vote massivement pour le pouvoir en place. La subversion étudiante et ouvrière est ravalée.»

Effectivement, le général de Gaulle – dont le pouvoir avait été fortement contesté lors des manifestations étudiantes et de la grève générale de mai-juin 1968 – se retrouve avec une «Chambre introuvable» (digne de celles de 1815 et de 1871), à composition fortement réactionnaire (trois quarts des élus en faveur des gaullistes et de leurs alliés giscardiens).

Ce résultat est dû au mode de scrutin utilisé en France (majoritaire à deux tours). Tout comme les scores électoraux de la défunte – je n’ai pas écrit regrettée – baronne conservatrice Margaret Thatcher en Grande-Bretagne, qui pratique le système majoritaire à un seul tour.
Dans son ouvrage A la prochaine…: de mai 68 aux Gilets jaunes (Paris, Ed. Syllepse, 2018), le sociologue Pierre Cours-Salies note: «En nombre de suffrages exprimés, il ne s’agit pas d’un raz-de-marée à droite. Par rapport aux élections législatives de 1967, le PCF [Parti communiste français] perd un peu moins de 600’000 voix (-2,43%) et la moitié de ses députés; la FGDS [Fédération de la gauche démocratique et socialiste] perd quelque 400’000 voix (-1,68%). Quant au centre, il perd environ 540 000 voix, tandis que les gaullistes gagnent 1’215’000 voix et les giscardiens 96’000» (p. 224).

Le second tour «transforme en débâcle le recul de la gauche: 3% des suffrages en moins, 60% des sièges en moins. D’un succès UDR [Union pour la défense de la république] il fait un triomphe: 6% de suffrages en plus, 50% de sièges en plus» (François Furet et Jacques Ozouf, «A qui la faute?», Le Nouvel Observateur, 26 juin 1968). Le parcours politique ultérieur de François Furet – passé en une trentaine d’années du stalinisme au néo-libéralisme – n’invalide pas ce constat d’époque.

Hans-Peter Renk,
Le Locle (NE)

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