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Une pratique peu respectueuse

Blaise Crouzier interroge les décisions prises au niveau fédéral pour tenter des maîtriser la pandémie et remet en question l’usage du pass sanitaire.
Pandémie

Actuellement, entre les manifestations composites du rejet de la vaccination et le consensus du «il faut bien en passer par là» on trouve peu d’espace pour l’expression du soutien au vaccin associé au rejet du pass sanitaire. Quelques prises de position isolées et les trois cent manifestants aux Grottes ne suffisent pas.

Pour diverses raisons, l’UDC dénonce un contrôle général et centralisé de la population alors qu’elle n’est pas opposée au contrôle centralisé ciblé sur certaines catégories de la population: militants, étrangers.

Refuser de lancer le débat sur une pratique qui oblige une partie de la population à contrôler tout un chacun et à transmettre ces données dans le cadre d’un système informatique centralisé est irresponsable. Justifiée par un temps limité dans une situation d’urgence, cette pratique pourrait malheureusement être réintroduite dans toute situation d’urgence, sanitaire ou sécuritaire, une autre pandémie ou une série d’attentats en Suisse suffirait. Le pli est pris, on a expérimenté cette pratique, alors pourquoi pas à nouveau, et dans des circonstances de moins en moins exceptionnelles?

Est-ce dans le souci de préserver la bonne image d’un ministre fort et compétent?

Mais le pass sanitaire n’est pas le truc de Berset, c’est celui du Conseil fédéral.

Le pass sanitaire permet d’éluder les questions de la réduction de la capacité des hôpitaux publics, du flux tendu, de leur fragmentation en services autonomes dont on contrôle une rentabilité compatible avec une éventuelle privatisation, au dépend de la coordination des soins. Le pass est aussi justifié par le désir d’un retour à la normale, à la sociabilité, mais n’est-ce pas surtout un retour à la consommation?

Malgré les premières réticences, le risque est que cette obligation et cette permission de contrôler ses concitoyens suscite des vocations de contrôleurs. Les appels à la collaboration de la population ne manquent pas et les dénonciateurs à l’autorité ou les justiciers autonomes répondent toujours présent, dans le glissement ambiant de la délégation de l’autorité de police à une société civile conservatrice dont on voit des exemples tragiques aux USA, en Russie, en Pologne, en Slovaquie, etc. Ceux-ci ne manquent pas de dénoncer l’inefficacité de la police et des autorités sanitaires tout en bénéficiant de leur soutien, de fustiger les étrangers comme sources de contamination, voire tout citoyen qui ne correspond pas à leurs phantasmes d’ordre et de sécurité.

Une obligation générale de vaccination serait plus respectueuse de nos libertés que le pass sanitaire, dans la mesure ou la définition d’un statut d’objecteur permettrait de trier et de clarifier les motivations des réfractaires aux vaccins, et de les intégrer dans notre politique de santé.

Blaise Crouzier,
Genève

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