Édito

Excès de zèle judiciaire

«La désobéissance civile est protégée» 1
Protestation contre les sanctions prononcées à l'encontre des militants de la Zad du Mormont, samedi 29 mai 2021 sur la place Saint-Laurent à Lausanne. KEYSTONE
Justice 

La justice vaudoise veut-elle jouer au premier de classe en défendant les intérêts – privés – de certain·es contre l’intérêt collectif? La question est permise et l’association de défense des droits humains Amnesty International la pose opportunément dans l’affaire de la Zad (zone à défendre) du Mormont. Le 1er avril, la police a évacué ce campement installé sur la colline homonyme dans le but d’empêcher l’extension de la cimenterie d’Holcim.

Au moins trente-sept de ces zadistes ont été condamné·es à des peines de prison allant jusqu’à trois mois. Cerise sur la douteuse pâtisserie judiciaire, ces militant·es se ont été privé·es de la possibilité de recourir au prétexte qu’ils et elles ont refusé de s’identifier au moment de la saisie. Il sera intéressant de voir ce que la Cour européenne des droits de l’homme – et les instances des Nations unies qui viennent d’être saisies – dira de ces cavalières manières. Mais en attendant, ces condamné·es peuvent à tout instant goûter à la paille humide des cachots vaudois.

Certes, qui se livre à de la résistance civile non violente doit être prêt·e à assumer ses actes. Reste que cela n’autorise pas les autorités vaudoises à s’affranchir des règles démocratiques de l’Etat de droit comme elles semblent vouloir le faire. Signalons que l’évacuation a donné lieu à des débordements des forces de l’ordre. La police s’est notamment permis d’expulser des journalistes – dont deux représentant·es du Courrier –, coupables de ne pas avoir d’accréditation officielle. Une invention opportuniste des pandores, qui frise le code légal.

Au vu de ce tableau d’ensemble, on peut se demander la raison de cet excès de zèle. Au-delà du respect de la loi et de l’ordre, gageons qu’il s’agit de faire un exemple. Et de décourager d’autres initiatives qui risquent de fleurir à l’heure de l’urgence climatique.

On a vu en juin, dans le cadre de la campagne de la loi sur le CO2, que de puissants intérêts se sont mobilisés pour garantir leurs prébendes et faire capoter cette législation. En montrant de la sorte les dents la justice vaudoise vise-t-elle à garantir ces privilèges qui menacent notre avenir? Le respect de l’intérêt général fait pourtant aussi partie des bases constitutionnelles de notre pays qu’elle a charge de défendre.

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