Édito

Bas les masques pour RFFA

Bas les masques pour RFFA
Les pays membres du G7 se sont entendus samedi à Londres pour tenter de mettre fin à la concurrence fiscale qui voit les multinationales de ces contrées «optimiser» leurs impôts. KEYSTONE
Fiscalité

C’était donc possible. Les pays membres du G7 se sont entendus samedi à Londres pour tenter de mettre fin à la concurrence fiscale qui voit les multinationales de ces contrées «optimiser» leurs impôts. En clair: planquer leurs avoirs dans des paradis fiscaux. Bien des aspects de cet accord demeurent ouverts. Et notamment celui de savoir quelles entreprises seront réellement concernées. Mais, pour l’heure, ces pays – Etats-Unis, Canada, Japon, France, Allemagne, Royaume-Uni et Italie– se sont entendus sur un taux plancher de 15%.

Un peu piquant pour la Suisse qui vient d’adapter sa fiscalité sur les bénéfices générés par les grandes entreprises. Le vote de la RFFA (Réforme de la fiscalité et de l’AVS), adopté par le peuple le 19 mai 2019, a vu, une fois de plus, la Suisse se livrer à une sous-enchère fiscale. Les taux prévus –13,49% pour le canton de Vaud, 13,99 à Genève – ont été assortis de clauses échappatoires faisant que, pour le premier canton, le taux réel est par exemple plus proche des 10,5%.

On le voit, cette posture ne tiendra pas à l’aune des réglementations voulues par les pays membres de l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économique). Cette dernière plaide depuis 2015 pour une telle harmonisation. La Suisse s’est, une fois de plus, distinguée en tentant de finasser avec des dispositifs dont la venue était pourtant annoncée.

Durant les discussions autour de la troisième réforme de la fiscalité des entreprises (RIE III, l’ancêtre de RFFA), il était déjà apparu que la sous-enchère fiscale allait poser problème. Les multinationales installées au bord du lac étaient passées d’un discours pleurnichard – «si vous nous taxez, on va partir en Irlande» – à un positionnement plus pragmatique – «ne mettez pas la barre trop bas, sinon, on va se retrouver dans le collimateur de Donald Trump».

Cette réalité vient de rattraper la Suisse. Deux ans seulement après la réforme RFFA. Dès lundi, on a vu des cantons parmi les plus prédateurs en la matière – Zoug, notamment – venir avec de brillantes idées pour contourner ces nouvelles obligations internationales. Il y aurait une méthode plus simple pour la Suisse: se conformer pour une fois à la décence élémentaire et cesser de jouer ce rôle de paradis fiscal avant que le reste du monde ne le lui impose, comme il l’a fait pour le secret bancaire. Mais cela serait sans doute trop simple et trop contraire à l’appât du gain qui impulse ces politiques délétères.

Opinions Édito Philippe Bach Fiscalité

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