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Pour un Plan climat qui respecte la justice climatique

Franziska Meinherz estime que le Plan climat de la ville de Lausanne ne va pas assez loin dans la lutte contre le dérèglement climatique et que le volet social n’est pas suffisamment pris en compte.
Lausanne

Le 13 janvier, la Municipalité de Lausanne a dévoilé son Plan climat. Les ambitions qui y sont exprimées restent trop modestes. Pour limiter le réchauffement climatique à 1,5°C, des pays comme la Suisse doivent atteindre la neutralité carbone en 2030. Or, le Plan climat lausannois vise zéro émission directe en 2050. C’est trop tard, et c’est trop peu: seulement un tiers de l’empreinte carbone de la Suisse relève des émissions directes, le reste étant des émissions importées. En se limitant à réduire les émissions directes, la Municipalité laisse de côté la grosse part des émissions lausannoises.

Et bien que la Municipalité ait exprimé sa volonté de coupler les objectifs du Plan climat à des mesures sociales, ces dernières restent peu présentes dans le plan. Or, une politique écologique qui ne tient pas compte des structures sociales, économiques et infrastructurelles dans lesquelles s’inscrivent nos modes de vie risque de pénaliser des personnes pour des comportements qui, loin d’être individuels, sont le résultat de contraintes structurelles. La notion de justice climatique exprime cette nécessité d’une transformation sociétale qui réduit les émissions carbone en même temps qu’elle lutte contre les inégalités sociales. Le Plan climat lausannois est loin d’une telle compréhension de l’écologie, comme le montrent les mesures proposées dans les domaines de la mobilité et du bâti.

Concernant la mobilité, le Plan climat mise d’un côté sur un report modal de la voiture principalement vers le vélo et la marche, et de l’autre côté sur les voitures électriques. Or, ces dernières causent beaucoup d’émissions indirectes lors de leur production et par leur demande d’électricité, qui risque d’être satisfaite au moyen de centrales de charbon en Allemagne. Au lieu de réduire l’empreinte carbone lausannoise, une augmentation du nombre de voitures électriques l’externalise simplement à d’autres pays. Pour réduire les émissions, il faut créer des réelles alternatives à la voiture. Les expériences des villes européennes qui ont instauré la gratuité des transports publics tout en investissant dans le réseau montrent que ces mesures permettent à un grand nombre de personnes de réduire leur utilisation de la voiture, favorisant des mobilités qui sont non seulement plus durables, mais aussi vecteurs d’une meilleure qualité de vie. Quand est-ce que la Municipalité de Lausanne décidera de suivre l’exemple de ces villes?

Et dans l’introduction du chapitre sur le bâti, la Municipalité exprime certes la nécessité de prévoir des mesures pour protéger les locataires contre des hausses de loyer excessives en cas de rénovation énergétique. Or, les mesures présentées invoquent uniquement les locataires pour déplorer leurs comportements énergivores. Pourtant, des mesures qui réduisent à la fois la consommation énergétique des bâtiments et la pénurie de logement qui sévit à Lausanne existent: la Municipalité pourrait systématiquement utiliser son droit de préemption pour acheter des logements à la hauteur des standards énergétiques et à loyers modérés et abordables.

Une telle politique de logement, ainsi que la gratuité et l’extension des transports publics, sont des exemples de mesures politiques qui respectent la justice climatique et qui promettent ainsi une réduction des émissions carbone couplée à une amélioration de la qualité de vie et du pouvoir d’achat de la population. Battons-nous pour qu’une version 2.0 du Plan climat lausannois comprenne de telles mesures!

Notre invitée est candidate Ensemble à gauche à la Municipalité de Lausanne.

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