Édito

Culture, automne complexe

Culture, automne complexe
Des visiteurs portant des masques regardent des livres dans la librairie lors de la 11eme édition du Livre sur les quais le samedi 5 septembre 2020 à Morges. KEYSTONE/Jean-Christophe Bott
Culture

C’est parti pour une nouvelle rentrée culturelle. Presque normale, pouvait-on croire ces derniers jours, qu’on soit allé au Livre sur les Quais à Morges, qui a vécu «une bonne édition, malgré le contexte», selon sa directrice Fanny Meyer; ou dans les rues de Vevey pour les deux premiers jours du festival Images, avec un public aussi curieux que largement au rendez-vous. Quant à la Bâtie, à Genève, elle aborde sa seconde semaine de spectacles fermement convaincue que «ça valait la peine d’avoir autant mouliné pour y arriver», souffle son directeur, Claude Ratzé.

On verra pour la suite, alors que les scènes romandes inaugurent ce mois leur saison 2020-2021. Et que plusieurs musées accrochent de nouvelles expos, avec ou sans vernissage. Voire que les cinémas osent à nouveau programmer des blockbusters, à l’image du Tenet de Christopher Nolan, qui a d’ores et déjà attiré plus de 60’000 spectateurs-trices helvétiques en dix jours. Ceci malgré une trame dont personne n’a compris grand-chose, c’est dire.

Le tout reste extrêmement fragile, on s’en doute, avec des institutions prêtes à revoir une ixième fois leurs scénarios, au fil de l’évolution du virus et des règles du jeu. Par exemple pour cause d’entrée en zone rouge de certains pays, empêchant la venue d’artistes à l’affiche. Et avec cette inconnue: le public acceptera-t-il de jouer sur le long terme le jeu de gestes barrières qui incluent parfois masque et surtout traçage? A la Bâtie, une partie des spectateurs manifeste son mécontentement, constate Claude Ratzé.

Fragile, l’adjectif qualifie aussi la très grande majorité des protagonistes de la culture helvétique. Selon un sondage de l’Association suisse de musique SONART, effectué auprès de 4000 artistes du pays, ces derniers s’attendent à une perte de revenu de 80% à 90% pour le second semestre 2020 (Le Courrier du 27 août). C’est énorme. Et d’autant plus inquiétant qu’une proportion conséquente de ces personnes est traditionnellement exclue des mécanismes de soutien, statut précaire oblige.

La balle est actuellement dans le camp du parlement fédéral, qui discute d’une loi Covid-19 et de son volet culturel. Alors qu’«environ 70% de la population se rend au moins une fois par an au musée, au concert, au cinéma ou visite un monument et près de la moitié va au théâtre (47%)», selon un document statistique de l’Office fédéral de la culture, il est primordial que celles et ceux qui font les arts ne soient pas oublié-e-s.

Opinions Édito Samuel Schellenberg Culture

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