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Politique migratoire absurde

Politique migratoire absurde
Il nous faut de toute urgence dessiner des perspectives pour tous les autres «héros» de notre quotidien. KEYSTONE
Asile

Le cas de l’infirmière iranienne Helia Najafzadehkhoei menacée de renvoi vient à nouveau jeter une lumière crue sur l’inhumanité de la politique migratoire helvétique. Alors que la jeune femme était en première ligne ce printemps pour sauver les malades du Covid-19 à l’hôpital cantonal de Genève, elle est priée de «rentrer chez elle» dès le mois de septembre. Bien qu’ayant vécu près de la moitié de sa vie en Suisse et suivi ses études avec succès dans notre pays, l’Office cantonal genevois de la population et des migrations estime qu’elle n’a pas assez d’attaches en Suisse…

Au-delà des interprétations restrictives du droit auxquelles nous ont habitués les autorités, et des incongruités dans le traitement administratif des demandes, ce genre de cas révèle une nouvelle fois l’une des absurdités des lois helvétiques en matière d’immigration: les travailleurs extra-européens ne sont pas les bienvenus en Suisse, exceptions mises à part. Or ceux-ci répondent à des besoins que les Suisses et les migrants communautaires ne sont souvent pas en mesure de satisfaire, dans l’économie domestique ou dans d’autres secteurs. Et certains non-Européens, de par leurs histoires de vie, les liens avec leur famille et avec notre pays, ont toute légitimité à accéder à des permis d’établissement sans nécessairement passer par une procédure d’asile.

La crise du Covid-19 a été un nouveau révélateur de cette situation: voir des milliers de migrants, sans papiers pour la plupart, faire la queue chaque semaine pendant plusieurs heures pour obtenir un colis de nourriture d’une valeur de 19 francs, a plongé Genève dans la honte ce printemps. Car si ces travailleurs qui s’occupent de nos enfants et de nos aînés, nettoient nos appartements et nos bureaux, en d’autres termes rendent des services inestimables à notre communauté, se sont retrouvés sans emploi et ont souffert de la faim durant cette période, c’est bien parce qu’on leur refuse tout statut légal. La régularisation de près de 2400 d’entre eux en 2018 à travers l’opération Papyrus doit être saluée, mais elle reste de toute évidence très insuffisante.

Si l’hypocrisie de nos politiques apparaît de manière flagrante dans le cas d’Helia Najafzadehkhoei – lui demander de quitter le territoire après avoir sauvé des vies –, elle doit par extension être dévoilée vis-à-vis de tous ceux qui contribuent au bien-être de notre société et sont privés de droits au nom de dogmes d’un autre siècle. Alors que l’espoir est permis que la courageuse infirmière iranienne puisse finalement avoir gain de cause grâce à la campagne lancée en sa faveur, il nous faut de toute urgence dessiner des perspectives pour tous les autres «héros» de notre quotidien.

Opinions Suisse Christophe Koessler Asile Covid-19

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