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Europe, où est ta voix?

Quentin Arnoux craint l’émiettement progressif d’une politique européenne unifiée.
Politique

Les récentes interactions entre les pays Européens, les Etats-Unis, l’Iran, la Palestine et Israël forcent à nous questionner sur l’application aléatoire du droit international relatif à certains dossiers en Asie de l’Ouest, voire sur ses infractions et leur passage sous silence. Ici, une Europe soudée et inflexible qui impose une vision multilatérale de la résolution des conflits en Iran ou dans le Levantin, là, une Europe menacée par autrui dont les éventuelles sanctions en cas de non-alignement ont la faculté étonnante de contenir les réactions et de rendre perméable tous beaux idéaux énoncés auparavant. Le manque apparent de cohésion et de solutions concrètes sur des problématiques aussi complexes semble par ailleurs se caractériser par un dangereux silence qui peut être perçu de façon ambiguë.
Les grandes précautions prises par la Suisse la semaine passée pour quémander l’aval des Etats-Unis afin d’envoyer des biens humanitaires à l’Iran – pourtant déjà autorisés dans le cadre de l’accord 5+1 sur le nucléaire – ont surpris. Le rappel en urgence ce week-end de l’ambassadeur tunisien à l’ONU après qu’il s’est publiquement montré peu réceptif au plan de paix proposé par les Etats-Unis censé résoudre la solution à deux Etats entre Israël et la Palestine a consterné. Enfin, la lenteur et la réticence d’une majorité des pays européens à clairement éconduire cette même proposition, contraire aux résolutions de l’ONU, inquiètent mais exprime finalement une dynamique générale de réticence et de silence face à l’administration Trump.

Ainsi, après la sortie unilatérale des Etats-Unis de l’accord sur le nucléaire iranien en 2018 et le rétablissement de sanctions à l’encontre de l’Iran, la France, l’Allemagne et le Royaume-Uni ont aimé rappeler avec force leur attachement à cette solution viable ainsi que leur motivation à l’élaboration du système financier INSTEX (Instrument in Support of Trade Exchanges) pour favoriser les échanges commerciaux avec l’Iran sans utiliser le dollar américain et donc contourner les sanctions. Or, nous devons constater que les belles promesses sont restées lettre morte. On se souvient surtout du récent ultimatum audacieux des Etats-Unis tablant sur l’instauration d’une taxe automobile si l’Europe refusait d’obtempérer pour enclencher le mécanisme de résolution des conflits prévu par l’accord à la suite des conséquences délicates, mais prévisibles, qui ont suivi la défection américaine. La mise en œuvre de ce même dispositif à la mi-janvier enterre d’une part, la faisabilité du système INSTEX, d’autre part, ne laisse finalement pas de doute sur la primauté que l’Europe accorde à sa prospérité économique face à ses engagements internationaux.

De façon similaire, les réactions peu claires, neutres, voire positives de certains pays européens comme la Belgique ou le Royaume-Uni sur le récent projet de paix américain entre Israël et la Palestine qui cisaille ouvertement les accords d’Oslo ainsi que les frontières reconnues de 1967, laissent entrevoir un problème plus profond qui va probablement s’amplifier dans les jours à venir: l’émiettement d’une politique européenne unifiée et le passage sous silence de propositions qui mériteraient pourtant d’être dénoncées avec vigueur.

Quentin Arnoux, étudiant de master en lettres à l’université de Genève

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