Édito

Recul historique

Recul historique
Les mines antipersonnel ont tué 3059 personnes dans le monde en 2018 et en ont blessé 3837 autres. KEYSTONE
mines antipersonnel

Donald Trump nous a habitués au pire. Mais en décidant il y a une dizaine de jours d’autoriser à nouveau l’usage de mines antipersonnel dans les guerres, le président étasunien fait un pas de plus dans l’abject. «Cette annonce revient à une condamnation à mort, à la mutilation et à des handicaps lourds pour les civils», a réagi à raison Marco Kirschbaum, directeur de Handicap International Suisse (HI).

L’ONG est cofondatrice de la Campagne internationale contre les mines (ICBL), Prix Nobel de la paix 1997, qui a réussi à obtenir, la même année, l’adoption de la Convention d’Ottawa sur l’interdiction des mines antipersonnel. Depuis, 164 pays ont signé ce traité, en faisant ainsi une norme universelle du droit international. Malgré cette grande avancée, les mines terrestres ont encore tué 3059 personnes dans le monde en 2018 et en ont blessé 3837 autres. Si les Etats-Unis sont l’un des rares pays à ne pas avoir paraphé le traité – avec la Chine, l’Egypte, l’Inde, Israël, le Pakistan et la Russie –, Barack Obama avait décidé en 2014 de formaliser la pratique en vigueur de ne plus recourir à de telles armes.

Sous la pression de l’armée, Donald Trump signe un recul historique, tout en se réfugiant derrière les nouvelles technologies: désormais, ces mines, qui demeurent actives jusqu’à plusieurs décennies après un conflit, sont censées s’autodétruire après un certain laps de temps. Les milieux de défense des civils contre les ravages de la guerre n’y accordent que peu de crédit. «L’idée que les mines dites ‘avancées’ seront plus sûres que les anciens modèles est absurde. Que se passe-t-il si elles ne se neutralisent pas comme prévu? Nos équipes voient de leurs propres yeux comment des armes souvent commercialisées comme ‘autodestructrices’ continuent de blesser, mutiler et terroriser quotidiennement des civils dans le monde entier», indique Handicap international.

Ce jeudi à Genève, sur la place des Nations, devant la chaise géante Broken Chair – qui symbolise par son pied arraché les dizaines de milliers de personnes mutilées par ces mines –, la population est invitée par l’ONG à exprimer son indignation. La Campagne internationale pour l’interdiction des mines antipersonnel a annoncé qu’elle allait tout faire pour convaincre les autorités étasuniennes de revenir sur leur décision dans les prochains mois.

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