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Un corps parfait, c’est quoi?

Un corps parfait, c’est quoi?
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L’été est là et nous en profitons le plus souvent pour aérer nos corps et nos esprits, à la plage ou en montagne. Nous voulions faire régime ou nous mettre au sport. Peu importe au final. Malgré nos complexes par rapport à mille détails concernant notre apparence, vivre une période plus calme nous ressource.

Durant un atelier de «décod’image», face aux visages ou aux corps des femmes et des hommes de la publicité, une remarque revient fréquemment: «ils sont parfaits». Quelle est la définition de la perfection selon les dictionnaires en ligne? Un être ou une chose réunissant toutes les qualités, ce qui ne peut être amélioré, une norme idéale. Pourtant, cette norme change au fil du temps et selon les cultures.

Quels que soient les âges, traduire la perfection en mots reste ardu, bien que les images des médias semblent réunir devant nos yeux les ingrédients actuellement incontournables, auxquels nous sommes apparemment sensibles. Il y a la peau lisse et sans bouton de poupées de cire féminines. Côté masculin, un visage sérieux et des rides confirment l’expérience. Intellectuellement, nous savons que ces faciès ont subi des chirurgies digitales. Mais que nous le voulions ou non, l’information s’est infiltrée en nous, sans étiquette précisant chaque fois les ingrédients. Or, «80% des étudiantes ayant feuilleté des magazines de mode rapportent, immédiatement après, une moindre satisfaction corporelle que celles ayant parcouru des revues d’actualités.»1>Les troubles du comportement alimentaire, Rebecca Shankland, éd. Dunod, 2009.

Un corps parfait, c’est quoi? 1

Alors qu’est-ce que la perfection en Occident actuellement? Avoir un visage symétrique et des proportions grecques? Etre blanc de peau, hâlé par le soleil ou métissé? Mesurer plus de 175 cm pour 48 kg quand on veut entrer dans le mannequinat féminin? Les corps de sportifs vus par le photographe Howard Schatz nous invitent à interroger la perfection sous un autre angle.
Chaque athlète de sa série de 2002 est «parfait-e» à sa façon, parce que chacun-e s’est perfectionné-e pour accomplir un certain type de performance: basket ou boxe, haltérophilie ou marathon, lutte ou équitation. On peut être grand-e, petit-e, lourd-e ou poids plume. L’essentiel est d’être efficace dans l’accomplissement de sa passion particulière.

Dans L’amour en Occident, Denis de Rougemont estimait en 1938 que «le conformisme esthétique atteint… une puissance telle que le choix d’un type de partenaire échappe de plus en plus au mystère personnel et se trouve déterminé par Hollywood». Que dirait-il aujourd’hui devant l’intensification du flux visuel par le biais des nouvelles technologies?

Minceur ou muscle, les idéaux, surtout féminins, sont de plus en plus étroits et nous sommes nombreux-ses à tenter toutes sortes de méthodes pour y ressembler. Dans ce contexte, ces portraits ne sont-ils pas une façon de rappeler que chaque personne est belle à sa manière, par ses différences? Car chaque corps exprime une histoire particulière de l’humanité, un chapitre de vie avec ses défis à dénouer pour évoluer et laisser éclore une fleur unique.

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* Médiatrice socioculturelle et responsable de projets à la fondation images et société, www.imagesetsociete.org

Opinions Chroniques Eva Saro

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mardi 3 juillet 2018

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