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Utile référendum contre la LME

ÉNERGIE
Le Parlement veut déréguler

le marché de l`électricité. Un référendum

est en cours de lancement. Heureusement
.

Un référendum
sera lancé contre la nouvelle loi sur le marché de l`électricité
(LME). La décision a d`ores et déjà été
prise mais des discussions sont encore en cours pour élargir au
maximum le front des opposants à cette privatisation d`un
bien essentiel.

Le Parlement suisse a en effet voté le 15 décembre dernier
par 159 voix contre 25 (pour la chambre basse) et 36 voix contre 2 (pour
la chambre haute) ce texte. La netteté des scores montre que le
clivage gauche/droite a volé en éclats un grand nombre
de députés de gauche se sont réfugiés dans
une abstention de mauvais aloi.

Ni le Parti socialiste suisse ni les Verts suisses ne participent actuellement
au référendum. En revanche ce dernier sera appuyé
par plusieurs sections cantonales de ces partis de mouvements politiques
comme solidaritéS qui ont déjà jeté leurs
forces dans la bataille et par plusieurs syndicats.

Car il s`agit bien du bradage d`un bien public qui est en train
d`être organisé pour la plus grande joie des milieux
financiers. A terme cela n`étonnera que les candides les
riches seront plus riches les consommateurs paieront davantage et la
protection de l`environnement sera sacrifiée sur l`autel
de la rentabilité.

Initialement le processus de privatisation a d`ailleurs été
institué pour une seule raison: relancer l`économie
suisse en crise en fournissant aux entreprises – et à elle
seules – du courant moins cher. Jean Cattin auteur du rapport commandé
par le Conseil fédéral en 1995 l`a d`ailleurs
encore répété il y a un peu plus d`un an lors
d`un séminaire organisé par l`Université
de Genève. Les ménages a-t-il expliqué paient relativement
bon marché leur courant par rapport à ce qui se pratique
dans d`autres pays; ils ne doivent pas espérer une baisse
de leur facture de courant1.

HAUSSE DES PRIX

Cette tendance a d`ailleurs été enregistrée
dans tous les autres pays qui se sont lancés dans ce genre d`opérations.
La Norvège pays précurseur en la matière la dérégulation
avait dans un premier temps abouti à une diminution du prix du
kilowattheure. Il a suffi d`une année sèche et froide
(où l`offre a chuté et où la demande a augmenté)
pour que les faillites se succèdent et qu`à l`arrivée
les prix dépassent ceux de l`ancien système.

 

 

 

Ce qui n`est
que logique. Comme l`explique Susan George2 militante antimondialisation
bien connue parler de marché pour ce genre de prestation est un
non-sens économique. L`eau le courant les trains etc. sont
des monopoles naturels qui lorsqu`on les privatise aboutissent
à une rente de situation: «Tout à fait normalement
et naturellement les nouveaux propriétaires capitalistes tendent
à imposer des prix de monopole au public tout en se rémunérant
largement eux-mêmes».

Non seulement les prix sont plus élevés que dans un système
en main publique mais le service est souvent de moindre qualité
et se dégrade. Les exemples fleurissent depuis la dégradation
de la sécurité dans les trains en Angleterre jusqu`aux
rats que l`on a retrouvés dans le réseau d`eau
du Yorkshire.

Même un pays de vaste taille comme les Etats-Unis où théoriquement
un marché électrique peut être envisagé du
point de vue économique est en train de vivre ces jours-ci une
situation de crise.

CRISE EN CALIFORNIE

En Californie où tout ce marché a été totalement
dérégulé en 1996 les compagnies sont au bord de
la faillite3. Le mécanisme a été similaire à
ce qui s`est passé en Norvège. Pour obtenir la dérégulation
les autorités ont dû garantir au consommateur un prix plafond.
L`électricité étant un produit qui se prête
bien à la spéculation les prix ont flambé –
avec des pointes à 1400 dollars le mégawattheure pour un
prix habituel de 30 dollars! – et les compagnies vendent à
perte.

Le référendum permettra de mener un débat avec des
arguments un peu plus sérieux que les slogans infantiles qui ont
tenu lieu d`argumentation politique jusqu`à présent.
Par exemple sur les suppressions d`emplois massives que cela entraînera
– selon une étude de l`Organisation internationale du
travail les privatisations ont entraîné en Europe des pertes
de 15% d`emplois dans ces secteurs et de 40% dans le domaine électrique
en Grande-Bretagne. Ou sur les diminutions de prestations prévisibles:
en Californie il a été proposé d`organiser
des pénuries tournantes c`est-à-dire de couper le
courant à tel ou tel quartier.


1Voir Le Courrier du 10 novembre 1999 p. 3. Cet article
a été repris dans le numéro Spécial OMC du
27 novembre 1999.

2Susan George in: Société de marché démocratie
citoyenneté et solidarité: un espace de confrontation.

3Le bimensuel solidaritéS consacre un dossier à cette affaire
dans sa dernière livraison No 119 pp.12 à 15.

 

Opinions Sélection Autre Édito Philippe Bach

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