Le mérite de Donald Trump est d’éclairer d’une lumière crue, sans fioritures, la «loi du plus fort» que les Etats-Unis imposent au monde depuis des décennies. La question des barrières douanières est le dernier avatar de ces diktats qui font et firent trembler le monde, au gré des intérêts de l’Oncle Sam.
L’histoire du pays montre pourtant qu’avant de se positionner comme un défenseur du libre-échange, les Etats-Unis avaient, dans un premier temps, verrouillé leurs frontières pour développer leurs propres entreprises, consolider leurs industries naissantes tournées vers le marché intérieur. Avant d’imposer leur propre agenda économique au reste du monde, contraignant les autres pays à ouvrir toutes grandes leurs frontières pour y écouler leurs produits sans entraves, accusant le nationalisme économique de tous les maux. Les économies de nombreux pays, pas assez forts pour leur résister, furent ainsi laminées.
L’ultralibéralisme, propagé par les économistes fraîchement émoulus de l’université de Chicago, influencés par Milton Friedman, fit en effet des ravages dans les pays dits les moins avancés, qui, eux, n’eurent pas la chance ni la possibilité, avant d’ouvrir leurs frontières, de protéger leurs tissus économiques encore fragiles.
Au nom de cette idéologie, relayée par le Fonds monétaire international, la Banque mondiale et leurs «programmes d’ajustement structurels», les pays africains, entre autres, furent ainsi sommés de supprimer leurs barrières douanières, d’ouvrir tout grand leurs marchés aux importations, de privatiser leurs entreprises publiques – rachetées par de grands groupes occidentaux –, de supprimer toute subvention et appuis étatiques, de couper à la hache dans leurs budgets de la santé et de l’éducation.
Avec à la clé, la perte de milliers d’emplois, la faillite d’innombrables petites et moyennes entreprises locales frappées de plein fouet par la concurrence déloyale de produits venus de partout, une perte totale de souveraineté économique qui perdure jusqu’à aujourd’hui sur fond d’un accroissement spectaculaire de la pauvreté et des inégalités.
Du côté des USA, pendant ce temps, mues par l’appât du gain et dans un contexte de financiarisation délirante de l’économie, les entreprises américaines ont délocalisé à tour de bras et désindustrialisé leur pays. Aujourd’hui, l’économie des Etats-Unis est une coquille vide, le pays importe désormais, d’Asie et d’ailleurs, la quasi totalité de ce qui y est consommé.
Pour tenter d’enrayer cette dynamique et faire produire dans des usines américaines les biens vendus aux Américains, Donald Trump a multiplié les promesses électorales, promettant de «rapatrier des millions d’emplois» pour rendre aux Etats-Unis leur statut perdu de «superpuissance industrielle». Elu en bonne partie par les victimes de la désindustrialisation du pays, il fait aujourd’hui marche arrière toute. Et, à nouveau, tout le monde est prié de s’aligner. En revanche, les pays dits du Sud qui tenteraient de faire passer leurs propres intérêts avant ceux des pays étrangers et de produire eux-mêmes ce qu’ils consomment seraient aussitôt mis à l’index. La loi du plus fort, toujours.