Le Berger des mers, libre
Le «berger des mers», Paul Watson, a finalement été libéré ce mardi, après 149 jours d’emprisonnement au Groenland. Le Danemark a rejeté la demande d’extradition formulée par le Japon.
Il risquait gros. Le système judiciaire japonais ne laisse guère de chances à la défense, ses procureurs se targuent d’un taux de condamnation de 99,6%! En l’occurrence, les accusations lui ayant valu un embastillement étaient pour le moins légères: un marin d’un baleinier illégal aurait été blessé par l’envoi d’une bombe puante sur le navire. Ce que contredisait une vidéo tournée par Sea Shepherd, son organisation. Des années derrière les barreaux l’attendaient.
C’est que le problème était surtout politique. Pour le Danemark, d’abord. Ce pays ne porte pas le militant écologiste dans son cœur. En cause, ses dénonciations contre le massacre de dauphins – qualifié de chasse traditionnelle – aux îles Féroé. Ce qui explique son attitude proactive.
Pour le Japon, ensuite, qui poursuit la chasse à la baleine en contravention avec les normes internationales. Ce pays a honteusement refusé d’appliquer la convention qui a permis de préserver ces cétacés menacés de disparition pure et simple, en arguant de chasse scientifique. Une tricherie en plein jour, cette viande finissant sur les étals japonais. Il a ensuite décidé de jeter le masque et d’assumer son attitude prédatrice et commerciale en armant un nouveau bâtiment pour ce trafic.
Pour la communauté internationale, enfin. L’activisme musclé du tenant de la «non-violence agressive», qui admet de s’en prendre aux biens matériels sans causer de blessures, peut déranger les tenants du laisser-faire. L’activiste écologiste est allé jusqu’à couler des baleiniers illégaux. Mais sans cette radicalité – le mouvement visant à lutter contre la chasse baleinière dépasse d’ailleurs Paul Watson – existerait-il encore des baleines?
Son combat n’est pas terminé. Sur le plan juridique, les poursuites lui ayant valu son emprisonnement et qui étaient secrètes vont être attaquées. Et, au-delà des baleines, ce sont les pratiques prédatrices de l’industrie de la pêche qui sont contestées. Celles-là même qui affament des populations côtières en Afrique, où les eaux territoriales sont louées à des géants de l’alimentaire qui vident les mers de toute vie.
En cela la libération du «berger des mers» est une bonne nouvelle. Elle s’inscrit dans une évolution des rapports de nos sociétés au vivant. Tous les soutiens du fondateur de Sea Shepherd ne sont pas vegans comme lui. Mais ils admettent que certains excès doivent être corrigés et que la sauvagerie capitaliste de l’industrie de la pêche doit être bridée et régulée. De toute urgence.