Colore ta rue!
Une rue a été repeinte par des habitantes et habitants des Eaux-Vives lors de la «Ville est à Vous» des 5 et 6 octobre. La rue Sillem, rendue piétonne depuis peu, s’est parée de couleurs grâce à l’action de bénévoles de l’association Vivre aux Eaux-Vives (VAEV). Cette action participative a symboliquement mis en valeur le biotope vivant et aquatique existant jusqu’à la fin du XIXe aux Eaux-Vives. Voilà de l’eau et de la verdure surgissant du béton! Cette activité a été autorisée par la Ville de Genève. Cette œuvre y est désormais permanente. Des voisin·es se sont joint·es aux habitant·es de la rue pour vivifier l’endroit.
En raison de contraintes techniques, il a été demandé que les personnes s’impliquant le fassent pour deux heures au minimum, comprennent le schéma du dessin et soient capables de peindre précisément. L’activité était ainsi bien encadrée et le résultat final parfaitement réalisé. Combien de commentaires positifs et émerveillés de la part des passants, des voisins? Des centaines!
Il suffit de peu pour réenchanter une rue et se la réapproprier! On constate malheureusement souvent un rapport mécanique et muséal à la ville. Les normes, peurs et interdits semblent éteindre toute possibilité de participer à la création de la ville. Il paraît osé, même dans le strict respect du cadre légal existant, de repeindre une rue. Cela semble aussi transgressif que d’y planter une fleur ou y aménager un espace pour jouer. L’espace public est devenu tellement contrôlé qu’on y respire à grand-peine. Quel bien cela fait pourtant d’y ramener de la couleur et de la vie!
Découvrant l’œuvre de la rue Sillem, des personnes citent en souriant la rue piétonne de Carouge, décorée de parapluie, ou le quartier Bleichi de Saint-Gall entièrement repeint en rouge par l’artiste Pipilotti Rist et l’architecte Carlos Martinez; la Rümelinsplatz, à Bâle, où une énorme peinture artistique «Asphalt Art» réjouit les touristes et les commerces.
A la rue Sillem, pour 2000 francs de peinture, le rapport immédiat à l’environnement a changé. Imaginons une seconde ensemble le nombre de places, de trottoirs que l’on pourrait repeindre à peu de frais, combien de comités de citoyennes et de citoyens pourraient changer le gris du bitume en rose, en rouge ou en blanc. Utopique? Nullement! Cette opération toute simple a des vertus sociales. Les gens se parlent, appréhendent leur environnement d’une autre manière. Des jeunes y trouvent une expression collective valorisante étayant un sentiment d’appartenance. Eh oui, quand on a passé deux jours à genoux à peindre un bout de rue, on est ensuite plus enclin à le respecter. Il y a une fierté à réaliser ce type de travail. C’est en rendant le domaine public aux habitant·es que l’on fabriquera des citoyens et citoyennes concerné·es et impliqué·es. Enfin, le gain écologique n’est pas négligeable. Des études récentes ont démontré que l’on gagne deux degrés sur la canicule en repeignant des villes en tons clairs. Modifier l’albédo des surfaces (leur pouvoir réfléchissant) est efficace. Alors, on sort nos pinceaux?
Sylvain Thévoz,
Député, membre du comité Vivre aux Eaux-Vives (VAEV)