Une faille risquée
Face au lobby de l’armement, les principes sont-ils à géométrie variable? Le Conseil fédéral aimerait pouvoir déroger aux critères d’autorisation de la Loi fédérale sur le matériel de guerre (LFMG) «lorsque des intérêts essentiels de politique extérieure ou de sécurité l’exigent».
C’est dans ce but, et sur demande du Parlement, qu’une consultation a été ouverte mercredi et court jusqu’au 4 septembre. Qu’on se rassure, les exportations vers des pays commettant des violations graves et systématiques des droits humains ne seraient pas permises.
La Chine, la Turquie ou l’Arabie saoudite tombent-elles dans cette catégorie? On peut malheureusement en douter. L’affaire des fusils d’assaut identifiés par la RTS, il y a deux ans, sur des images de la guerre que mène Riyad au Yémen depuis 2015 fournissait un exemple, parmi d’autres, de la difficulté à exercer un contrôle efficace (la vente des fusils était antérieure à la restriction des exportations vers le royaume belligérant).
Il arrive aussi que des pièces détachées ou des éléments d’assemblage ne tombant pas sous le coup d’une restriction finissent par être utilisés à des fins militaires. Bref, une telle dérogation ne serait pas sans risques, d’autant plus dans le contexte international volatil que nous connaissons.
Et ce retour en arrière a de quoi faire bondir, alors que le Parlement avait précisément renoncé à cette possibilité il y a deux ans lors de l’étude du contre-projet à l’initiative populaire «Contre les exportations d’armes dans des pays en proie à la guerre civile», dite initiative «correctrice».
Contre-projet qui était déjà le fruit d’un compromis. Retour à la case départ? La gauche dénonce à juste titre un déni démocratique, tandis que le Groupe pour une Suisse sans armée prévoit, lui, de lancer un référendum. Pour que des directives claires et cohérentes mettent les populations à l’abri du matériel de guerre sorti de nos usines.