On nous écrit

Un combat nécessaire

Johanne Gurfinkiel répond à un courrier publié le 2 février.
Réaction

«Nos cicadiens voudraient nous faire avaler que l’on devrait chanter les louanges de l’apartheid (…). Les vrais nazis, c’est les critiques de l’apartheid»: le ton est posé. Dans sa tribune, véritable réquisitoire contre notre organisation, Hughes Poltier défend avec fougue les dénommées «apartheid free zones» en Suisse romande. «Quoi de plus sensé?» écrit-il. Quoi de plus sensé, en effet, que de défendre des zones d’exclusion visant uniquement les Israéliens juifs au cœur de Genève?

Contrairement à ce que sous-entend M. Poltier, la Coordination intercommunautaire contre l’antisémitisme et la diffamation (CICAD) ne fait que reprendre les définitions utilisées par le collectif Apartheid Free Zone (AFZ) pour dénoncer ses agissements. Selon l’AFZ, «l’apartheid israélien» opère une «division de la population palestinienne (…) qui garantit la domination des citoyen·es de confession juive sur les autres habitant·es.». Suite logique de ce raisonnement – pour reprendre les termes de M. Poltier, les Juifs étant les dominants, ce sont bien eux qui sont exclus des «zones libres d’apartheid». A ce titre, la CICAD devait intervenir.

En lisant les mots de M. Poltier, il nous semble primordial de rappeler la différence entre antisionisme et la critique du gouvernement israélien. L’antisionisme est le refus pur et simple de reconnaître le droit à l’autodétermination des Juifs. Ce n’est pas un terme qui a été inventé pour critiquer le gouvernement de l’Etat d’Israël. Pour cet exercice, il existe, comme pour les autres Etats, la critique politique.

Il n’est pas du ressort de la CICAD de s’exprimer sur les politiques d’un pays étranger. En revanche, cela devient ­l’affaire de la CICAD au moment où un conflit au Moyen-Orient est importé en Suisse romande et instrumentalisé pour discriminer des personnes et institutions juives. Lesdites «apartheid free zones» ne sont pas l’expression de simples critiques politiques visant un Etat, mais bien l’expression d’une discrimination et il est du devoir de la CICAD de tirer la sonnette d’alarme quant à ces dérives évidentes.

Finalement, autre affirmation scandaleuse, l’accusation selon laquelle la CICAD et les organisations juives revendiquent, «parce que juives», l’impunité généralisée de leurs paroles et leurs actes. En quoi est-ce que la CICAD revendique l’impunité «parce que juive», M. Poltier? La CICAD vous a-t-elle ­empêché de vous exprimer librement contre elle dans votre tribune? Absolument pas. En revanche, vos accusations diffamatoires nuisent au combat contre les discriminations.

Johanne Gurfinkiel,
Secrétaire général de la CICAD

Précision du Courrier

La lettre de M. Poltier (à lire aussi ci-dessous) réagissait à une prise de position du secrétaire général de la CICAD accusant le mouvement Apartheid Free Zones (AFZ) de créer des zones «Judenrein». Une accusation fausse et grave, car renvoyant au IIIe Reich et désignant les régions «nettoyées des Juifs » par déportation ou par exécution. En l’occurrence, les AFZ s’inscrivent dans le cadre du mouvement BDS (Boycott, désinvestissement, sanctions) visant à faire pression sur Israël comme cela été fait dans le passé vis-à-vis du régime d’apartheid en Afrique du Sud. Une démarche légale, comme l’a relevé la Cour européenne des droits de l’homme dans un arrêt du 11 juin 2020. CO

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