Édito

Coup de semonce

Coup de semonce
Manifestation contre la loi sur l'immigration, ce jeudi 25 janvier sur la place du Louvre, à Paris. KEYSTONE
France

Le Conseil constitutionnel français a censuré jeudi un bon tiers – 35 articles sur 86 – de la loi immigration votée dans la douleur le 19 décembre dernier. Un texte qui durcissait le droit dans toute une série de domaines sensibles comme l’accès aux prestations sociales pour les étrangers non européens, le regroupement familial ou qui prévoyait des quotas migratoires. Sans oublier des mesures anti-étudiant·es.

Il ne s’agit que d’une victoire partielle. Le gros de ces annulations – 32 des 35 articles biffés – provient d’un non-respect crasse du droit. Ces articles n’avaient pas vocation à figurer dans la loi. Ils étaient hors sujet. Rien n’empêcherait leur retour dans un cadre législatif adapté. Au vu de la dérive politique délétère observée en France – avec une droite de plus en plus extrême qui vient braconner sur les terres de l’extrême droite –, il y a de quoi rester raisonnablement inquiets. De fait, les patrons des Républicains ont exigé dans la foulée le repêchage des dispositions contestées. Cela s’appelle persister et signer dans l’ignominie.

Deuxième motif d’inquiétude: la clique macroniste gouverne par lois d’exception – l’usage compulsif de l’article 49.3 pour passer en force – ou en ayant recours à des subterfuges. Elle a voté une loi comportant des articles déshonorants en espérant que ceux-ci seraient invalidés. Elle consacre une nouvelle fois de la sorte les thèses de l’extrême droite – qui a immédiatement crié à la victoire idéologique – et lui ouvre un boulevard, alors que le locataire de l’Elysée s’était présenté à l’élection comme rempart aux idéologies fascisantes.

Pis. Ce triste épisode d’une loi identifiée comme illégale et votée aux forceps consiste à laisser le Conseil constitutionnel faire le sale boulot. Et être désormais confronté à la vindicte du bloc de droite qui embouche des trompettes antidémocratiques, arguant «d’un coup de force des juges», selon les mots de Jordan Bardella, président du Rassemblement national. Mais pas que lui. Ce discret fumet populiste est porté aussi par les Républicains. Donald Trump fait des émules. A quand une tentative de putsch, comme au Capitole? Au discrédit politique et idéologique vient s’ajouter le discrédit institutionnel.

Opinions Édito Philippe Bach France

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