Eco-socialisme ou barbarie
Ces températures moyennes mondiales pendant les trois mois d’été (juin, juillet et août) ont été les plus élevées jamais mesurées, selon les calculs de l’observatoire européen Copernicus, qui fait référence en la matière et dont les données alimentent les rapports du Giec (Groupe d’experts intergouvernemental sur le climat). En se fiant aux modèles développés à partir des carottages de glace dans l’Antarctique ou de la compilation des cernes des arbres, il se pourrait même que des maximas aient été atteints sur une durée de 120’000 ans, c’est-à-dire depuis les débuts de l’humanité!
Le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, a résumé ainsi la situation: «L’effondrement climatique a commencé.» Les événements météorologiques extrêmes comme les incendies au Canada, à Hawaï ou en Grèce, les pluies diluviennes en Inde (près de 900 morts!) et autres ouragans se multiplient.
Il ne faut bien sûr pas confondre météo et climat, mais le réchauffement global de notre planète provoque une augmentation mesurable et calculable de ces situations. Par exemple, les conditions particulièrement favorables aux feux canadiens ont été rendues sept fois plus probables à cause des émissions de CO2 d’origine humaine1>«L’été 2023, le plus chaud jamais mesuré, marqué par une litanie d’événements climatiques extrêmes», Le Monde du 6 septembre..
Un constat effrayant. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que la réponse des autorités n’est pas à la hauteur. A tous les niveaux. Sur le plan national, en Suisse, le plus grand parti, l’UDC, tient des propos climato-négationnistes et le lobby de la voiture œuvre pour davantage de routes. Et même au niveau local, le gel à Genève par le magistrat cantonal Pierre Maudet de la mesure visant à pacifier la circulation autour de la gare relève d’un populisme court-termiste certain.
Cette incapacité à réagir à cette crise majeure du XXIe siècle est lourde de risques en termes de survie de l’humanité et porteuse de risques politiques. Un danger identifié dès les années septante par un des fondateurs de l’écologie politique, André Gorz. Ce philosophe biberonné à l’existentialisme et au marxisme prophétisait déjà le risque d’un écofascisme en cas d’incapacité à faire face aux enjeux environnementaux.
La dynamique capitaliste, pour assurer sa survie, prendrait le dessus sur l’Etat et imposerait par en haut, pour le profit de quelques-un·es, des mesures autoritaires à même de préserver certains équilibres environnementaux, annonçait-il. Reprenant le slogan de Rosa Luxembourg «Socialisme ou barbarie», il prônait un écosocialisme pour prévenir un écofascisme. Un regard qui a gardé toute son actualité. Et son urgence.
Notes