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Transmettre des savoirs et des savoir-faire

Directeur de l’Association pour le patrimoine industriel (API) à Genève,  Franck Vacheron a fait l’objet d’un portrait dans le cadre de la série d’été consacrée au sujet. Il répond à l’agora de l’historienne Alix Heiniger parue le 8 août (voir nos articles et notre dossier ci-dessous).
Patrimoine industriel

En réponse à Alix Heiniger, nous tenons à préciser que nous n’avons pas une vision angélique du patrimoine industriel, mais que nos propos n’ont pas pu évidemment être repris intégralement. Oui, nous développons un enthousiasme que nous espérons communicatif sur le patrimoine industriel. Il serait difficile de ne pas reconnaître que les entreprises comme la SIP [Société genevoise d’instruments de physique] ou les pionnières du vélo ou de la moto sont des exemples encore vivants par l’énergie, l’inventivité et l’excellence qu’elles ont connues. Mais nous ne pouvons faire abstraction des luttes syndicales, des conflits (nous avions par exemple évoqué le sort des premières linotypes qui furent jetées des étages des imprimeries de journaux), des premières mutuelles (celle de Motosacoche)…

Nous avions en outre parlé de l’aspect social de l’API qui accueille en son sein les Brigades d’utilité publique, organe de travail et de réinsertion pour les laissés pour compte de l’industrie – au départ de l’imprimerie et aujourd’hui du monde du travail en général.

Oui, il serait intéressant de montrer les conséquences sur la ville, les contextes historiques dont nous héritons (par exemple l’identité de nos syndicats suisses directement issus des corps de métier) et les transferts de techniques d’une industrie vers une autre. Nous avions plusieurs fois cité des innovations dans la mécanique, pour la caméra de cinéma, la motorisation des vélos, etc., qui n’auraient pu se faire sans que des ouvriers formés à l’horlogerie participent à la conception de ces innovations dont toute la planète a profité.

Nous avions aussi fait part de la place des femmes dans l’imprimerie, proscrites jusque dans les années septante à Genève, hormis les veuves d’ouvriers typographes.

Enfin, oui, nous donnons raison à Alix Heiniger qui suggère d’associer les Archives contestataires et le Collège du travail (ce que nous avions suggéré aussi) afin de comprendre le patrimoine industriel comme un facteur politique prépondérant mais aussi culturel; non pas pour dénigrer tel ou tel domaine, mais pour prendre leçon des conflits et des ruptures comme sources de rebondissements et de regains.

Enfin, nous avons beaucoup insisté pour présenter en quoi l’API n’est pas passéiste, et surtout pas nostalgique. Notre vocation réside dans la transmission de savoirs et de savoir-faire. Nous formons des personnes à ce titre. Mais pour que cela ne soit pas un regard sur un monde caduque, nous faisons naître des projets contemporains avec des techniques anciennes, ou des vieux outils. Nous associons par exemple des matrices réalisées en 3D, modélisées par nous-mêmes, pour finalement les déposer sur des presses anciennes et imprimer avec.

Nos recherches dans le domaine éditorial permettent d’entendre les machines fonctionner, aussi bien dans la reliure que dans les ateliers graphiques. C’est cela que nous aimons, que les choses fonctionnent grâce à des humains qui se sont donné le mot.

C’est pourquoi vous découvrirez beaucoup de créations dans les expositions à l’écomusée Voltaire de l’API, car ce sont les créateurs qui éprouvent les techniques et ouvrent parfois de nouvelles voies.

Actuellement, l’exposition «Le téléphérique» est un bon exemple puisque des musiciens contemporains, un luthier et des constructeurs présentent des installations sonores. Ce sera de nouveau le cas pour la prochaine exposition grâce à un partenariat avec l’ensemble Contrechamps, pour l’exposition qui s’appellera «Le microphone», et pour laquelle des compositeurs actuels vont utiliser du matériel sonore suisse mythique (Revox, Nagra, Torrent, Lenco…)

Nos efforts portent donc sur une vision positive de l’industrie dans laquelle la dénonciation est possible mais vite contrebalancée par des initiatives heureuses, fussent elles dérisoirement petites (nos moyens étant ce qu’ils sont). Nous renouons avec les AI (arts industriels) mais en incorporant l’IA (intelligence artificielle). L’API, ce sera cela.

Opinions Agora Franck Vacheron Patrimoine industriel

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Série d'été - Patrimoine industriel

dimanche 9 juillet 2023
Genève abrite un héritage industriel riche et méconnu. Cet été, Le Courrier redécouvre avec vous les moments-clés de cette histoire foisonnante, et vous emmène à la rencontre de celles et ceux qui,...

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