Édito

Ces droits fragiles et réversibles

CES DROITS FRAGILES ET REVERSIBLES
KEYSTONE
Droits humains

La semaine dernière, les yeux étaient rivés sur la Cour suprême américaine. Celle-ci a heureusement choisi, pour l’instant, de préserver l’accès à la pilule abortive. Les milieux de défense des droits des femmes étaient inquiets. Avec la décision de la plus haute instance du pays de révoquer l’arrêt Roe contre Wade qui protégeait le droit d’avorter, la liberté de disposer de son corps a enregistré un recul gigantesque l’an dernier.

Les droits sexuels et reproductifs semblent, aujourd’hui plus que jamais, fragiles et réversibles. Mercredi dernier, à Berne, le Forum parlementaire européen pour les droits sexuels et reproductifs (European Parliamentary Forum for sexual and reproductive rights, EPF) s’alarmait de nouveaux assauts contre ces libertés fondamentales. Savamment organisés en associations, académies ou think tanks, des mouvances conservatrices exercent un important lobbying politique.

Ces groupes affirment vouloir restaurer «l’ordre naturel». Ils défendent une famille hétérosexuelle et patriarcale et s’opposent au mariage homosexuel ou à l’interdiction des discriminations fondée sur l’orientation sexuelle ou l’identité de genre. Certains exigent même la stérilisation des personnes transgenre, zappant ainsi tout un pendant des droits humains.

Cet activisme conservateur, qui se réclame parfois du christianisme, aurait pris de l’ampleur ces dernières années et leurs moyens auraient beaucoup augmenté. Au bénéfice d’un «relooking», il prend aussi de nouvelles formes, plus insidieuses. En France, la Manif pour tous, qui s’opposait à l’avortement, s’appelle désormais Le Syndicat des familles. Certaines organisations désinforment des femmes qui cherchent des infos sur l’IVG. D’autres ont monté leurs propres médias sous d’autres noms et logos pour faire passer leurs messages et infiltrer le monde médiatique traditionnel.

Ces attaques sont inquiétantes car elles font reculer les progrès sanitaires en empêchant certain·es d’accéder à des services de santé tels que la contraception ou à la prévention de maladies sexuellement transmissibles.

Les droits sexuels et reproductifs suscitent parfois des réticences d’ordre moral ou religieux car il touche aux représentations collectives du contrôle du corps, du rôle procréatif de la sexualité ou de la façon d’être une famille. Ils sont cependant indispensables à l’autonomie des femmes et de l’égalité de toutes les personnes, peu importe leur identité de genre ou leur orientation sexuelle et doivent être défendus becs et ongles!

Opinions Édito Julie Jeannet Droits humains

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