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Une marche qui en appelle une autre

A Genève, la Journée internationale de lutte pour les droits des femmes s’est revendiquée comme une réponse à AVS21 et un appel à la mobilisation pour la grève féministe du 14 juin prochain.
Une marche qui en appelle une autre
Sur les coups de 17h, elles et ils ont pris la rue pour crier leur colère contre le patriarcat multiforme. KEYSTONE
8 mars

La pluie a pris parti. Après avoir arrosé la ville sans relâche en ce 8 mars, Journée internationale de lutte pour les droits des femmes, elle a décidé d’épargner les manifestant·es qui s’étaient donné rendez-vous en début de soirée, à la rue du Mont-Blanc à Genève.

Sur les coups de 17h, elles et ils ont pris la rue pour crier leur colère contre le patriarcat multiforme, caché derrière le relèvement de l’âge de la retraite des femmes, les restrictions au droit à l’avortement et le manque de valorisation des métiers à majorité féminine, entre autres. Au plus fort de la manifestation, elles et ils étaient 2000 selon les organisatrices, 800 selon la police.

«Le 8 mars, c’est une occasion de faire le bilan», a-t-on pu entendre au début du rassemblement. Les organisatrices ont rappelé que la situation des femmes en Suisse, mais aussi dans le monde – beaucoup de personnes arboraient des messages de soutien aux femmes iraniennes – est loin d’être satisfaisante et reste dans tous les cas passablement précaire. Cette journée de lutte en appelle donc une autre et sonne comme un préambule pour une grève féministe de grande ampleur, le 14 juin prochain.

«Le 8 mars, c’est une occasion de faire le bilan»

Un «bouquet de lois»

Plus tôt dans la journée, des élues issues du Parti socialiste, d’Ensemble à gauche et des Vert·es ont présenté conjointement aux médias quatre projets de loi. Elles ont notamment rappelé que les citoyens et citoyennes genevois·es n’ont pas suivi la tendance nationale et ont refusé dans les urnes la réforme AVS21. Déposées la veille auprès du Grand Conseil, leurs propositions suivent trois pistes d’actions qui se veulent une concrétisation de cette volonté populaire cantonale.

La première mesure prévoit l’établissement d’une rente-pont dès 64 ans, soit une prestation transitoire, dont l’objectif serait de permettre aux femmes qui le souhaitent de quitter le marché du travail à 64 et non 65 ans. La deuxième modification vise une revalorisation salariale pour le personnel de la fonction publique dans les domaines du social, de la santé et du nettoyage. Des secteurs, statistiquement à majorité féminine, «dont nous ne pouvons pas nous passer», selon Caroline Marti, élue PS.

«Finalement, nous souhaitons intégrer une reconnaissance de la pénibilité psychologique des métiers liés au care, au même titre que la pénibilité physique des métiers du bâtiment», déclare Françoise Nyffeler, députée d’Ensemble à gauche. Le chiffrage et les moyens de compensation de cette nouvelle notion devraient être déterminés dans un second temps. Ces propositions seront étudiées par le parlement cantonal.

Par les flammes

Au cœur de la manifestation, Clémentine marche droite dans son manteau rouge. Son maquillage pailleté s’accorde à sa pancarte en carton, brandie le poing levé. «Tout brûler», peut-on lire. «J’ai l’impression que tout est à recommencer», affirme-t-elle. «Il y a tellement de choses à changer. Il faudrait faire table rase pour tout reconstruire de zéro.» Derrière elle, Laureline, les cheveux rouges flamboyants dans une heureuse coïncidence, renchérit: «Les femmes demandent des droits basiques. On ne serait pas là, à dépenser toute cette énergie, si nous les avions déjà obtenus.»

Tandis que la nuit tombe, le cortège s’arrête sur les marches du Grand Théâtre. Au lendemain du vote du Conseil national qui a refusé de retirer l’avortement du Code pénal, les organisatrices dénoncent les deux initiatives de l’UDC, intitulées respectivement «La nuit porte conseil» et «Sauver les bébés viables», qui ralentiraient et compliqueraient les procédures d’interruption volontaire de grossesse. La foule gronde de rage. A la recherche d’un exutoire, le cortège se dirige vers Plainpalais pour «brûler le patriarcat».

Arrivé·es au centre de la plaine, les manifestant·es forment un cercle autour du bûcher. Après des prises de parole rappelant la précarité du salaire minimum cantonal et la nécessité de tendre vers un féminisme intersectionnel, c’est le moment. Les fumigènes craquent et enveloppent la foule d’un brouillard vert et violet.

Puis une pluie de boulettes en papier, censées représenter les maux du patriarcat, sont jetées sur le feu. Par les flammes, au son des tambours et en chanson, le ton est donné: «Le 14 juin, c’est grève féministe, on bloque la Suisse.»

Mobilisation vaudoise

Le Collectif de la grève féministe Vaud s’est mobilisé hier sur la place de la Riponne à l’occasion de la Journée internationale des droits des femmes à Lausanne. En fin de journée, elles étaient environ 2000 à défiler au centre-ville.

«Encore, encore, encore des inégalités! Assez, assez, assez d’inégalités», ont clamé les participantes, au nombre de 2000 selon la police. «Le 8 mars est une journée importante. On donne le ton pour le 14 juin 2023», a souligné le Collectif. Dans l’après-midi, animations, stands et discours ont souligné la solidarité avec les féministes du monde entier, la lutte contre les violences faites aux femmes et contre les oppressions patriarcales.

Parmi les autres actions du jour, l’Union syndicale vaudoise (USV) a lancé sa campagne de mobilisation pour la grève féministe du 14 juin2023 au travers du journal 8 minutes. Distribué sur les lieux de travail par l’ensemble des fédérations de l’USV, il demande «du respect, du temps, de l’argent».

Le Syndicat suisse des services publics (SSP-Vaud) a pour sa part relancé sa campagne «#encolèretantquilfaudra». De l’école obligatoire au post-obligatoire, les enseignantes ainsi que tous leurs collègues solidaires étaient invités à s’habiller en rouge pour dire stop aux inégalités dans les écoles et ailleurs. Cette action se répétera chaque mercredi au moins jusqu’au 14 juin. ATS

Régions Laura Morales Vega 8 mars

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