Chroniques

Permis de tuer dans les territoires occupés

Au pied du mur

«Entre les deux vendredi [23 et 30 juillet], quatre corps de Palestiniens innocents sont tombés dans les rues de Cisjordanie. Aucun des quatre n’avait mis en danger la vie des soldats qui ont tiré, certainement pas d’une manière qui justifiait les tirs mortels. Ils ont tué un enfant de 12 ans et un plombier de 41 ans. Ils ont tué un adolescent de 17 ans et un jeune de 20 ans qui assistait à des funérailles. Tout cela en une semaine.» C’est avec une rage non dissimulée que le journaliste Gideon Levi a écrit ces lignes dans l’édition du Haaretz du 1eraoût, rage que devrait partager tout·e Israélien·ne qui a encore un minimum d’humanité. Mais combien sont-ils encore?

Toute occupation est faite de violence et de sang d’innocent·es. L’occupation coloniale israélienne ne fait pas exception même si, pendant deux décennies, ses porte-paroles ont vainement tenté de faire passer l’image d’une «occupation éclairée», celle d’un colonialisme soft.

Ce qui a changé depuis 2000, c’est qu’on peut se regarder dans le miroir avec le sang des innocent·es sur notre front et ne pas avoir honte, c’est qu’on ne se soucie plus de l’image du tueur qui s’y reflète. A l’époque, on parlait encore de bavures ou de victimes collatérales. On enquêtait. Parfois on avouait, après des enquêtes qui prenaient des mois voire des années, avoir «fait un usage excessif de la force». Ce qui a changé depuis 2000, c’est qu’on ne s’excuse plus, on assume les meurtres sans rougir. L’armée israélienne n’est plus seulement une brutale armée coloniale, mais un ramassis de commandos de la mort, comme dans les régimes les plus sanguinaires du siècle passé.

Sous le commandement du général en chef Aviv Kochavi, la chasse aux Palestiniens, jeunes de préférence, est ouverte. Crimes de guerre? Crimes contre l’humanité? Je ne suis pas juriste. Pour cela il y a une Cour pénale internationale (TPI) qui se doit d’enquêter, le cas échéant traduire devant un tribunal le général Kochavi, les politiques qui lui donnent le feu vert et les subalternes qui obéissent à ses consignes et, si nécessaire, sanctionner.

Sanctionner les criminels de guerre est une question de sécurité publique internationale: c’est la leçon qu’avait tirée la communauté internationale après la défaite de la barbarie nazie, en établissant les procès de Nuremberg, et plus tard le traité de Rome qui a donné naissance au TPI.

En tant que Juif israélien, cet appel à des sanctions est aussi une reconnaissance de dette envers mes grands-parents et leur génération, celle des victimes du plus grand judéocide de l’histoire.

* Militant anticolonialiste israélien, fondateur du Centre d’information alternative (Jérusalem/Bethléem).

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