Suisse

Une privatisation cousue de fil blanc

Une privatisation cousue de fil blanc
L’autonomisation de PostFinance risque de provoquer une nouvelle réduction du réseau postal en affaiblissant le service public. KEYSTONE
Privatisation

Le Conseil fédéral fait-il fausse route en voulant privatiser PostFinance, comme l’affirment les syndicats? Voire. La manœuvre est surtout cousue de fil blanc et s’inscrit dans un démantèlement des services publics construit sur la durée.

Depuis vingt-cinq ans, toute une série de services et régies publiques ont été mis à l’encan. Au nom d’une prétendue concurrence. En réalité, bien davantage pour assurer des revenus à un capital en mal de reproduction. Une politique impulsée par Bruxelles et que la Suisse a servilement mise en œuvre. Y compris sur des bancs qui se réclament volontiers d’un souverainisme à croix blanche.

Cela a commencé avec la scission de la régie PTT. Cela a continué avec les CFF et le marché de l’électricité. A l’arrivée, les gains promis aux usagers se sont révélés être un miroir aux alouettes. De fait, la deuxième étape de la libéralisation de l’approvisionnement en électricité peine à se matérialiser. Il est vrai que dans d’autres pays, le processus s’est révélé si dévastateur que les autorités ont été obligées de déroger aux règles qu’elles s’étaient elles mêmes fixées. Et la crise climatique a montré la nécessité d’une planification en la matière pour éviter la catastrophe environnementale.

L’autonomisation de PostFinance voulue par le Conseil fédéral fonctionne selon la même logique néolibérale. Ce processus aura surtout un effet: provoquer une nouvelle réduction du réseau postal qui a socialement isolé tant de personnes et provoqué moult remous politiques. Ceci de manière mécanique en réduisant la rentabilité des offices.

Cerise sur le gâteau: ce processus annoncé mercredi implique de la part de l’Etat l’injection de quelque 1,7 milliard de francs dans la future banque postale privée. On ne voit pas pourquoi cela serait impossible avec l’actuel réseau postal. Les cantons le font bien avec leurs banques cantonales. C’est que le but est ailleurs. On affourage un service public, on le privatise pour que les petits copains puissent réaliser des bénéfices en se reposant sur leur oreiller de paresse.

La pandémie a montré l’importance d’un service public digne de ce nom. Cela n’a échappé à personne. Sauf au Conseil fédéral? L’affirmer relèverait de la naïveté. Les syndicats évoquent déjà l’idée d’un référendum. Il sera intéressant de voir si une alliance entre la gauche et les régions périphériques, qui seront massivement touchées et lésées, ne peut pas bloquer dès le traitement parlementaire ce si douteux projet.

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