Édito

Régime de violence

Régime de violence
Face à l’immense mobilisation d’une population fatiguée par la crise, le président, Ivan Duque, a choisi la méthode forte, l’intimidation. KEYSTONE
Colombie

Un policier qui abat à bout portant un jeune qui vient de donner un coup de pied à sa moto. L’image choc, tournée au premier jour de la révolte colombienne, décrit mieux que tout le mépris de la vie du régime colombien. Depuis quelques jours, les réseaux sociaux et les courriels militants se font l’écho de la très violente répression de la grève générale initiée le 28 avril, que les agences internationales et la presse colombienne ont largement ignorée. Tirs à balles réelles sans sommation, tabassages indiscriminés… probablement une trentaine de personnes ont payé de leur vie leur participation à des blocages, des piquets de grève, voire à de simples marches, tandis que près de cent manifestant·es manquent à l’appel. Sans oublier les innombrables blessé·es.

Face à l’immense mobilisation d’une population fatiguée par la crise, le président, Ivan Duque, a choisi la méthode forte, l’intimidation. C’est la marque de son régime. Depuis que ce fidèle d’Alvaro Uribe a pris le pouvoir, pas une semaine ne s’écoule sans que l’on apprenne l’assassinat d’un ou une militant·e social·e – indigène, afrocolombien·ne, syndicaliste, écologiste, paysan·ne. Plus de 600 personnes assassinées depuis août 2018, car elles dérangeaient un intérêt économique quelconque ou un potentat local. Sans oublier les ancien·nes membres des FARC éliminé·es par esprit de vengeance. Des crimes impunis dans l’immense majorité des cas.

Il suffit de suivre le fil Twitter de l’ancien président Alvaro Uribe pour comprendre que les actuels dérapages policiers n’en sont pas. La stratégie de la terreur, menée sous sa présidence avec la complicité de l’armée et des paramilitaires, pour vider les campagnes et isoler la guérilla, peut et doit s’appliquer à tou·tes les contestataires, y compris dans les villes et les barrios.

A voir comment la communauté internationale a laissé tomber le processus de paix colombien, à voir l’impunité dont bénéficie ce criminel contre l’humanité, on n’est guère optimiste quant à la capacité des Etats et de l’ONU à stopper la dérive autoritaire et militariste du gouvernement Duque. On notera néanmoins le message adressé mardi depuis Washington par la Chambre des représentants, qui demande la suspension de l’aide militaire à la Colombie. Un changement de ton que l’on aimerait également entendre du côté du Palais fédéral.

Une manifestation de protestation contre la répression aura lieu samedi à Genève (place des Nations, 13h30).

Opinions Édito Benito Perez Colombie

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