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La burqa, pratique moyenâgeuse et patriarcale

«La ‘liberté de choix’ dépend fondamentalement de l’environnement culturel, religieux et économique dans lequel vit une femme.» Françoise Pitteloud, ancienne élue socialiste, s’exprime en faveur de l’initiative «anti-burqa».
Votation fédérale

Je tiens à remercier Madame Heidi Seray pour sa prise de position1>H. Seray, «Liberté de choix?», lettre de lectrice, Le Courrier, 3 février 2021. sur l’initiative UDC dite «contre la burqa» car, comme de nombreuses femmes, je la partage. Que les représentants des Eglises s’opposent à cette initiative au nom de la liberté religieuse peut paraître compréhensible car on pourrait en déduire, un peu cyniquement je l’avoue, qu’ils «prêchent pour leurs paroisses». Or si le port de la burqa n’a rien à voir avec la liberté de religions, il a tout à voir avec le machisme patriarcal des trois religions monothéistes. Les dignitaires de ces religions se sont illustrés durant des siècles par leurs injonctions sur les corps des femmes, considérées comme de tentatrices «Eves», des pécheresses impudiques, des sorcières pactisant avec le diable. Ils ont dénié aux femmes la liberté de vivre librement dans leurs corps, leur ont imposé des tenues entravant leurs mouvements, les ont consignées à domicile, lapidées ou brûlées au nom de Dieu ou de la bienséance. Le port de la burqa est à relier à tant de nombreuses injonctions des religions monothéistes sur le corps féminin!

S’opposant aux diktats religieux comme à d’autres sphères de pouvoirs patriarcaux, les femmes ont dû mener bien des combats, ne serait ce que pour qu’on leur reconnaisse, par exemple, le droit de posséder une âme ou de pouvoir participer aux célébrations des cultes. Ayant grandi dans un canton très catholique et ayant subi une majorité d’enseignantes religieuses, que n’ai je pas entendu sur les rôles et les comportements attendus des femmes. Exemple cocasse, il nous était interdit de porter à l’école des pantalons en hiver si ceux ci n’étaient pas recouverts de nos jupes habituelles. Quant au père capucin qui nous donnait les cours de religion, il nous taxait de viles tentatrices! C’était probablement pour cette raison que les sonneries des sorties de gymnase des garçons et de celui des filles – qui n’étudiaient pas ensemble évidemment – étaient décalées, pour éviter que nous ne nous mélangions sur l’avenue de la Gare.

L’avortement et la contraception étaient strictement interdits. C’est pourquoi la «liberté de choix» dépend fondamentalement de l’environnement culturel, religieux et économique dans lequel vit une femme. Il a toujours fallu aux femmes beaucoup de courage et, surtout, de moyens pour prendre leurs libertés, au risque de se couper de leur milieu familial et social, souvent au péril de leur vie. Les femmes d’aujourd’hui l’expérimentent encore!

Le port de la burqa est synonyme d’une vision du corps de la femme comme lieu de péchés et de tentations et également de l’appartenance exclusive à un mâle dominateur. Mais je n’oublie pas que ce sont trop souvent les femmes, les mères, qui transmettent à leurs filles les règles oppressives ou les stéréotypes de genre et de comportements qui leur sont attribués.

Alors qu’aujourd’hui certaines femmes ne s’opposent pas au port de la burqa au nom du féminisme me sidère! Elles ne peuvent ignorer que ce sont des hommes qui, au nom d’un Dieu masculin évidemment, ont imposé cette pratique barbare et oppressive, exigeant que les femmes soient enfermées dans une prison de tissu les empêchant de se mouvoir, de communiquer normalement avec d’autres humains, d’exprimer face ouverte leurs émotions ou encore de pratiquer des activités professionnelles ou sportives.

Ont-elles oublié leurs indignations face aux talibans afghans imposant, toujours au nom de Dieu, le port du tchador, interdisant aux femmes d’étudier, d’être soignées par des médecins, de participer à la vie publique? Oublié les cris de tant de femmes qui luttent partout dans le monde contre leur statut de mineures, propriétés de mâles qui seuls peuvent les voir dévoilées et sans lesquels elles n’ont pas le droit de se déplacer, de conduire ou faire du vélo, d’étudier ou de signer des actes officiels?

Comment, à l’heure où les femmes fêtent l’obtention d’un droit de vote résultant de longs et multiples combats, revendiquant que leurs corps leur appartiennent et qu’elles doivent pouvoir en jouir librement, peuvent-elles parler du port de la burqa, pratique moyenâgeuse et patriarcale, comme d’un libre choix?

C’est vrai qu’il s’est trouvé de nombreuses femmes opposées à l’obtention du suffrage féminin! Et, certes, l’UDC n’est pas subitement devenue féministe. Mais je n’ai jamais voté en fonction de mots d’ordre partisans, même au cours de ma vie de parlementaire, mais en fonction de mes convictions profondes.

Notes[+]

Notre invitée est ancienne députée et conseillère nationale, VD.

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