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Sortir du frein à l’endettement

Réagissant à une récente annonce de la conseillère d’Etat en charge des finances*, les élus socialistes des exécutifs communaux appellent les autorités cantonales à renoncer à une politique d’austérité, afin de soutenir l’économie locale, la transition écologique et les populations les plus précaires.
Genève

Alors que Genève fait probablement face à la pire récession connue depuis les années 1930, les autorités cantonales annoncent un plan d’austérité d’une ampleur sans précédent. Cette politique profondément anachronique renforce le risque d’une crise économique et sociale durable qui détruira les emplois, anéantira nos PME et aggravera la situation des plus fragiles.

Pourtant, l’Etat n’a pas hésité à s’endetter de près de 3 milliards pour sauver la Banque cantonale genevoise alors que les taux d’intérêts avoisinaient les 4% dans les années 2000. Alors que le PIB genevois a quasiment doublé en vingt ans pour dépasser désormais les 100’000 francs par habitant-e et que les taux d’intérêts sont devenus nuls ou négatifs, la droite cherche à réduire la dette par tous les moyens en pleine urgence écologique et sociale.

A l’ère des taux négatifs, le débat classique qui oppose hausse d’impôts et baisse des dépenses publiques n’est pas d’actualité. Dans ce contexte, tout en maintenant une gestion prudente et raisonnable, les pouvoirs publics devraient stimuler l’activité avec la dette qui, exprimée en pourcentage du PIB, sera mécaniquement réduite une fois la croissance retrouvée. C’est la manière la plus pragmatique de fonctionner aujourd’hui: le secteur public a un rôle anticyclique naturel à jouer en soutenant l’investissement dans la transition écologique, en favorisant la consommation dans l’économique locale et en protégeant les populations les plus précaires.

A l’aube d’une crise économique et sociale sans précédent (l’économie genevoise devrait se contracter de plus de 6% en 2020), le plan d’austérité annoncé par la conseillère d’Etat chargée des Finances va aggraver la crise économique, accroître le taux de chômage et couper dans les prestations publiques. C’est à la fois irresponsable et contraire aux chemins suivis par nos voisins. Par exemple, l’Allemagne pourtant connue pour sa rigueur budgétaire, et pays autrement plus endetté que la Confédération et le canton de Genève, a présenté début juin un plan de relance qui engage, en tout, jusqu’à 1230 milliards d’euros, soit plus de 15’000 euros par habitant-e.

Le canton ne peut pas faire comme si la crise sanitaire de ce printemps et ses conséquences n’existaient pas. Les seuils de déficits et les mécanismes de gestion financière conjoncturelle inscrits dans la loi sur la gestion administrative et financière ne sont plus adaptés à l’ère post-Covid-19.

Il est urgent que le gouvernement cantonal se montre à la hauteur de la situation afin d’éviter une catastrophe économique et sociale qu’annonce cette politique d’austérité, et de renoncer à un report massif des charges cantonales sur les communes, sans quoi ces dernières se retrouvent seules à devoir porter le soutien à l’économie locale, à la transition écologique et aux plus précaires. (Le plan financier quadriennal du Conseil d’Etat prévoit un report de 90 millions dont 20 millions en 2021).

Nous, magistrat-e-s socialistes communaux, nous nous engageons à défendre des budgets responsables, solidaires et à la hauteur de l’effort public nécessaire à enrayer la crise. Nous appelons les député-e-s de tout bord à suspendre le frein à l’endettement et au déficit cantonal afin de sortir de cette impasse et de donner à notre canton la possibilité de développer des prestations de qualité pour répondre aux besoins de la population, et de ne pas annuler les efforts budgétaires communaux.

Signataires:

Guylaine Antille, Jean-Luc Boesiger, Skander Chahlaoui, Ornella Enhas, Elisabeth Gabus-Thorens, Sami Kanaan, Carole-Anne Kast, Christina Kitsos, Stéphanie Lammar, Nathalie Leuenberger, Salima Moyard, Michel Pomatto, Martin Staub.

* Cf. «Le canton devra réduire ses dépenses», ats, Le Courrier du 15 juin 2020.

Opinions Agora Collectif Genève

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