On nous écrit

Réconcilier humanité et fraternité

Chiara Mari invite à s’inspirer du continent africain pour trouver de nouveaux chemins.
Société

Tout est parti d’une phrase d’un ami, «ce que vous appelez avec des noms compliqués Montessori, Freinet et Dewey nous le vivons ici au quotidien, dehors, avec nos enfants, le quartier». Interpellée par le sarcasme, j’ai voulu creuser.

Felwine Sarr, écrivain et économiste sénégalais, souligne que «les représentations négatives sur l’Afrique sont si ancrées qu’on ne prend même plus la peine de regarder la réalité. Et quand la réalité présente va à l’encontre des représentations, on les déplace alors dans le temps futur. Même si le continent s’en sort plutôt bien, il faut donc prédire une catastrophe». Je m’interroge sur la manière dont aujourd’hui encore subsiste une représentation qui relève d’instrumentalisation cachée.

La carte du monde à dimensions réelles est bien différente de ce que nous avons nous-mêmes appris à l’école. Dans une Europe qui est réellement toute petite, et qui se cherche, il me semble que le continent africain nous inspire des chemins de renaissance.

La notion de «Ubuntu», issue des langues bantoues et relevant du panafricanisme, nous appelle à réconcilier humanité et fraternité. Dans un climat d’individualisme exacerbé, cette responsabilité humaniste universelle est la sève de vie à réinvestir.

L’Afrique vient solliciter une inventivité et une créativité ici normalisées, triées, sectorisées et difficilement reconnues dans l’universalité. Ce continent réouvre la porte à l’art de la liberté.

Il faut revaloriser la culture également. Comme Fatoumata Diawara, Angélique Kidjo, Blick Bassy, Patrick Kabré et d’autres le montrent bien, le continent est un ferment extraordinaire de talents. La persévérance et le courage de leur message doivent nous secouer, et nous mener vers des sentiers non parcourus.

L’expérience de vie se transmet aussi par l’oralité, un langage poétique mais ancré, proche de la corporalité, de la nature.

Face à la marchandisation et à la pression sur l’apprentissage concurrentiel trop répandues, ce continent vient nous inviter à retisser un rapport personnel, un discernement et une acuité intellectuelle à transformer en vérité au service de l’humain. Ce que Nelson Mandela incarnait déjà par sa manière de concevoir l’éducation et la culture.

En conclusion, une ouverture à l’authenticité. Elle n’exclut pas les conflits. Elle ouvre au contraire au courage de les affronter et à y voir une occasion pour grandir, ensemble. Merci l’Afrique de nous le rappeler.

Chiara Mari,
Lausanne

 

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