Victoire incomplète
Le pasteur neuchâtelois Norbert Valley, qui avait été condamné en 2018 pour avoir hébergé un Togolais en situation irrégulière, a été acquitté jeudi en seconde instance. La victoire est belle pour les défenseurs du principe intangible de la solidarité, associations et personnalités présentes en force à l’audience à La Chaux-de-Fonds. Cette importante mobilisation, à gauche surtout mais aussi à droite, a sans doute pesé sur l’interprétation restrictive faite par le juge de l’article 116 de la Loi fédérale sur les étrangers. Le Tribunal a pu libérer le pasteur de toute charge, en minimisant l’aide réellement apportée, ne l’estimant pas de nature à entraver l’action administrative.
C’est heureux. Mais en creux, le jugement rappelle que la législation suisse continue de criminaliser la solidarité humaine envers des personnes parmi les plus fragiles. Une violation éhontée du droit international, celui-ci exigeant que l’on protège les acteurs humanitaires ainsi que les personnes potentiellement victimes de traite humaine.
Nombre de pays européens, tels l’Espagne, l’Italie ou la Belgique, connaissent d’ailleurs des dispositions immunisant les personnes qui agissent pour des motifs honorables. Ce qui permet de concentrer la répression sur les organisations criminelles, passeurs, marchands de sommeil et autres exploiteurs des clandestins. C’était également le cas de la Suisse avant que Christoph Blocher ne fasse modifier la loi en 2008.
La semaine dernière, la pseudo majorité centriste du Conseil national a balayé une initiative parlementaire, pourtant appuyée par 30 000 pétitionnaires, qui demandait un retour à plus d’humanité. Pour la seconde fois depuis le début de l’année et le jugement vaudois sur Credit Suisse, la justice helvétique montre plus d’ouverture que le pouvoir politique. On a envie de dire que ce n’est pas très difficile.