Virus ou «erreur système»?
Après en avoir grippé les rouages chinois, le covid-19 commence à s’attaquer aux deux moteurs du capitalisme mondialisé. Spectaculaire, le dévissage du prix du brut résume bien la panique qui s’est saisie des opérateurs: en deux semaines, le baril est passé de 55 dollars à 30 dollars, sous l’effet combiné d’une demande déprimée et d’une hausse de la production. La finance n’est guère en meilleur état, les bourses de la planète semblant se disputer, depuis fin février, le prix de la plus belle gamelle.
Embauches en berne, chômage technique, contrats non prolongés… la maladie n’a pas tardé à affecter les travailleurs. Elle se propagera bientôt aux salaires, puis aux recettes fiscales, tout en exigeant une intervention salvatrice de l’Etat. Devant un cas de force majeur, qui bouleverse l’organisation sociale, il est demandé à tous de faire sa part de sacrifices… Il s’agit surtout de ne pas être dupe!
Si l’économie locale a effectivement de nouvelles raisons de tousser et doit être soutenue, l’économie globale, elle, est une malade chronique, sans possibilité de rémission. Si ce n’était l’argent frais injecté depuis une décennie par les gouvernements et les Banques centrales, le casino planétaire aurait déjà mis la clé sous la porte. Coronavirus ou pas.
Un indicateur le résume à lui tout seul: en automne 2007, juste avant l’effondrement de Wall Street, l’indicateur vedette de la bourse étasunienne – le Dow Jones – était monté au dessus de la barre des 14 000 points. L’explosion de la bulle hypothécaire l’avait ramené à 7200 points en 2009. Dix ans plus tard, l’indice flirtait avec les 30 000 points, soit une augmentation de 400%, alors que le PIB étasunien gagnait 25% durant la même période…
Gonflées à l’hélium de la spéculation, les fortunes planétaires ont tenté de faire sécession et laissé en berne l’économie réelle. Tandis que la crise de 2007-2008 et ses prolongements politiques saignaient les revenus des travailleurs et les services publics, les milliardaires voyaient leur fortune commune tripler! Si le virus a déstabilisé le système, le bug est bel et bien au cœur du logiciel capitaliste. A ses profiteurs désormais de payer les dégâts.
Le simple citoyen – demandez aux Italiens! – paiera déjà bien assez cher, livré à des services sanitaires en piteux état. Plus que le coronavirus, ce qui menace aujourd’hui la vie de milliers de personnes est l’absence d’infrastructures médicales suffisantes. Le produit de décennies de logique économiciste des soins, de flux tendu et de rationnement larvé, de recherche scientifique passée sous la tutelle du profit, auxquelles la crise du coronavirus sert de révélateur. Et d’opportunité pour changer de direction.