Édito

Primat du politique

Primat du politique
Le Conseil fédéral lors de sa prestation de serment. KEYSTONE
Conseil fédéral

La pesanteur institutionnelle dans toute sa splendeur. Le Conseil fédéral sortant a été reconduit in corpore pour cette nouvelle législature. La Verte Regula Rytz qui a tenté d’ébranler le consensus conservateur a échoué mercredi à faire bouger les lignes de crête. Son score – 82 voix – en est l’illustration la plus patente. Elle n’a eu le soutien que du bloc rose-vert.

A l’arrivée, on a un gouvernement un peu moins représentatif de la population. Les Verts sont devenus le quatrième parti de Suisse. Mais pas pour le parlement. Le Conseil fédéral ne représente plus que 69% des votants; il a oscillé autour des 85% dans les années soixante. Ce taux aurait été quasi atteint (82% des électeurs) si les Verts avaient fait leur entrée dans l’Exécutif fédéral.

Ce découplage entre une classe politique retranchée dans son réduit du Palais fédéral et la population est encore accentué par la majorité PLR/UDC du gouvernement. Représentant 40% de l’électorat, ils bénéficient d’une majorité absolue et peuvent dicter leur loi. Cette hégémonie est potentiellement porteuse de blocages. La tentative au début des années 1990 à Genève d’un gouvernement monocolore de droite ne représentant qu’une partie congrue de la population avait abouti à un blocage institutionnel.

L’échec de Mme Rytz et de son parti n’est peut-être pas une si mauvaise nouvelle que ça. La formule magique n’a de magique que le nom. La pseudo concordance est à l’image de la représentativité de ce gouvernement: un héritage du passé. L’espace de consensus a fondu sous la poussée de la mondialisation néolibérale. Mme Rytz était trop. Trop à gauche, trop femme, trop marquée, pas assez consensuelle… Elle n’était surtout pas assez à droite. Les partis bourgeois n’aiment rien tant que d’adouber des personnes du camp adverse qui sont ensuite priées de mener sans trop rechigner leur politique antisociale. Le défaut rédhibitoire de l’élection au suffrage indirect du Conseil fédéral.

Vu l’ampleur des enjeux qui attendent la Suisse sur le front climatique, notamment mais pas seulement, ce n’est pas d’un laquais du capitalisme dont on a besoin, mais d’un changement d’orientation de la politique fédérale. Cela ne se fera pas dans les travées du Palais fédéral mais bien dans la rue. Et l’apport de Verts non prisonniers du consensus droitier ne sera alors pas de trop.

Opinions Suisse Édito Philippe Bach Conseil fédéral

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