«Macrise» hors de contrôle
L’Argentine traverse d’immenses tensions politiques et économiques. Emballement inflationniste, tentatives désespérées pour éviter une envolée des taux de change qui laissent à sec les réserves et situation de «défaut sélectif» sur le payement de la dette: le pays est au bord du gouffre et craint un écroulement du système similaire à celui de 2001.
Totalement erratique à moins de deux mois d’une élection présidentielle qu’il sait perdue d’avance, le chef de l’Etat, Mauricio Macri, a perdu toute crédibilité et la question se pose de savoir s’il réussira à finir son mandat. Le mois d’août, marqué par des élections primaires générales remportées par le péroniste social-démocrate Alberto Fernandez avec 49% de votes contre 33% au président sortant, a vu le peso perdre plus de 25% de sa valeur et les indices boursiers près de 50%. L’inflation interannuelle approche, elle, les 60%.
Macri l’a déclaré lui-même après ce violent revers: les marchés financiers ne veulent pas d’un retour du «kirchnerisme» au pouvoir – l’ancienne présidente Cristina Fernandez de Kirchner se présente en effet à la vice-présidence et Alberto Fernandez a été chef de cabinet de Nestor Kirchner. Mais c’est bien la politique de Macri qui a complètement ravagé le pays au cours des trois ans et demi qu’il a passé à la tête de l’Etat. Et ça, une majorité de votants l’a bien compris. Ils le vivent au quotidien. Augmentation de la pauvreté et du chômage, envol des prix, fermeture en cascade de petites et moyennes entreprises, le bilan du président – que de nombreux Argentins surnomment la «Macrise» – est tout simplement catastrophique.
Quant aux milliards empruntés avec la promesse de «relancer l’économie», ils se sont déjà envolés vers d’autre cieux, la somme de capitaux qui ont fugué d’Argentine ces dernières années dépassant déjà les 57 milliards de dollars du prêt que le FMI a accordé en 2018.
En élisant Mauricio Macri en 2015, une courte majorité des Argentins a exprimé sa lassitude des «années Kirchner». Ces douze ans ont amené d’importantes avancées sociales mais ont été marqués, sur la fin, par une inflation déjà relativement élevée ainsi qu’une usure de la population face au clientélisme péroniste et de multiples accusations de corruption. Il n’en reste pas moins que nombre d’entre eux se mordent aujourd’hui les doigts d’avoir cru aux promesses de bonheur que devaient amener, selon Macri, des politiques ultralibérales qui ont pourtant déjà coulé tant de fois le pays.