Édito

Le coût de la trahison

Le coût de la trahison
Le leader de la droite grecque Kyriakos Mitsotakis a déjà été intronisé premier ministre lundi. KEYSTONE
Grèce

A la suite de sa claire victoire aux élections législatives anticipées de dimanche, le leader de la droite grecque Kyriakos Mitsotakis a déjà été intronisé premier ministre lundi. Refermant ainsi de manière cinglante la parenthèse qu’a représentée pendant quatre ans et demi le gouvernement d’Alexis Tsipras et de sa coalition de la gauche radicale, Syriza.

Son arrivée au pouvoir, début 2015, avait pourtant suscité d’énormes espoirs pour une partie des Grecs et les tenants européens d’une gauche alternative. Principalement celui de résister aux politiques ultralibérales imposées depuis plusieurs années par Bruxelles, qui ont enfoncé une frange importante de la population dans la misère. Mais ces attentes ont été douchées dès l’été 2015. Malgré une large victoire du non au référendum sur le drastique plan «d’ajustement structurel» exigé par l’UE, le FMI et la Banque centrale européenne, Tsipras a rapidement plié sous la pression, trahissant les votants. Il a ainsi doctement appliqué les recettes de la Troïka, menant sans broncher les mesures d’austérité et les privatisations réclamées.

La coalition avait parcouru la moitié du chemin en accédant au pouvoir. Mais incapable de mettre en œuvre la volonté populaire, Tsipras a provoqué une déception à la mesure des promesses engagées. Syriza tente aujourd’hui de mettre en avant quelques légères améliorations sociales obtenues en fin de mandat (baisse des chiffres du chômage, hausse du salaire minimum, accès aux soins). Mais la dramatique situation dans laquelle se trouve le pays fait passer ces «résultats» pour d’insuffisantes mesurettes d’accompagnement du plan dévastateur qu’il a poursuivi avec zèle.

Cette désillusion, de nombreux Grecs l’ont surtout exprimée en ne se rendant pas aux urnes dimanche. Tout comme lors des législatives de septembre 2015, où le taux d’abstention avait atteint un record. Ainsi, même défaite par la droite, la coalition ne voit pas son nombre de votants s’écrouler (-7,5%), lui permettant de devenir la principale formation d’opposition. Mais pour combien de temps? La mise en place de politiques libérales une fois au pouvoir a déjà coulé une grande partie des formations sociales-démocrates traditionnelles européennes. Syriza risque bien de connaître à l’avenir le même sort. Ses renoncements et trahisons ont en effet durablement discrédité le parti de gauche.

L’expérience est d’autant plus amère qu’elle se conclut par un retour au pouvoir de la droite dure. Celle-là même qui a plongé le pays dans la crise. Une droite triomphante et décomplexée, qui bénéficie aujourd’hui de la majorité absolue au parlement (158 sièges sur 300) et promet déjà encore plus de libéralisme.

Opinions International Édito Gustavo Kuhn Grèce

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