Gloire au chasseur paléo inconnu!
Il y a 60’000 ans, ils n’étaient que quelques dizaines de milliers, mais ils avaient déjà fait plusieurs Dakar-Paris à pied, et même Dakar-Darwin (Darwin, dans les territoires du nord de l’Australie). Comme dans la Java des Gaulois, de Ricet Barrier, les paléolithiques chassaient le mammouth et couraient le guilledou. Sans leurs amours, il n’y aurait d’ailleurs jamais eu de Gaulois (nés bien après la disparition des mammouths!)… Et nous non plus, nous ne serions pas là, avec nos 7 milliards de concitoyens, pour saboter le monde…
Singes d’Afrique depuis 6 millions d’années, nos ancêtres pré-humains et humains vivaient de cueillette et de chasse dans des milieux divers et hostiles. Où nous, humains «modernes», crèverions en un jour à un an, selon nos aptitudes techniques et les conditions naturelles locales. C’est dire si ces animaux pré-humains et ces gens d’un autre âge avaient des compétences supérieures aux nôtres dans de nombreux domaines. Ils ont établi et maintenu de petites populations durables sur cinq continents, jusqu’à ce qu’une bande d’abrutis «néolithiques» inventent, depuis 10 000 ans, l’agriculture, le stockage des biens, la spéculation, le capitalisme, les guerres mondiales, les réseaux sociaux et les GAFAM. Plus de cent mille ans avant Moïse, Jésus et Mahomet, ils enterraient leurs morts, avec rituels et offrandes, parfois de fleurs. Ce qui était de meilleur goût que d’aligner des croix, des croissants, des étoiles de David ou de cramer les cadavres au pétrole. Bien sûr, ils parlaient depuis longtemps, même s’il est impossible de dire depuis quand. Et puis, ils dessinaient, sculptaient, faisaient de la musique, ici ou là, de Lascaux à Lespugue et du Sahara à Darwin – toujours en Australie! L’expérience des derniers chasseurs-cueilleurs ayant vécu en autarcie montre d’ailleurs que, bien traités, ils s’adaptent souvent à nos conditions de vie stupides, alors que nous serions bien en peine de survivre aux leurs. S’ils ont quoi que ce soit de «primitif», c’est leur adaptabilité à n’importe quoi, alors que les spécialisations de notre monde nous rendent, pour la plupart, inaptes à en partager d’autres.
«Et si nos ancêtres [paléolithiques] avaient tout inventé?» sous-titre un livre du collectif d’archéologues TeamPaléo, garanti-préfacé-béni par Jean-Paul Demoule, pape en la matière1>Retour vers le Paléo, TeamPaléo, Flammarion 2019.. Dans un langage hip-hop, les membres du collectif nous rappellent que l’origine de beaucoup de nos coutumes – la danse, la bière, le street-art, les tatouages, les pin-up et bien d’autres… – remonte aux singes descendus des arbres qui n’avaient pas encore généralisé l’agriculture et l’élevage, ne se massacraient qu’à petite échelle, ne bousillaient pas l’écosystème, et maîtrisaient leurs populations. «Et le singe devint con!» écrivait Cavanna… C’est ma définition du Néolithique! Le TeamPaléo nous rappelle qu’à part quelques fortes certitudes, les questions légitimes que nous nous posons sur les paléolithiques resteront souvent sans réponse, faute d’informations. On retrouve parfois leurs instruments de musique, mais pas leurs partitions. Ils les avaient, comme beaucoup de choses, seulement dans la tête. Ils dessinaient parfois des danseurs et des masques: pour des rituels, pour des fêtes, ou les deux comme souvent aujourd’hui? Les archéologues n’en finissent pas de multiplier les hypothèses inspirées du monde actuel, mais toutes invérifiables après la disparition des seuls concernés. Nul ne saura jamais leur vérité! En sciences, il est crucial de savoir ce que l’on ne sait pas et ce que l’on ne saura sans doute jamais. C’est LA grande différence avec les religions où les soucis de preuve et de vérification ne sont pas le problème. Car les humains ont la sale manie d’inventer ce qu’ils ignorent. Et dans des domaines où l’on ignore beaucoup, comme les origines et les coutumes de nos ancêtres paléos, on invente trop, ce qui masque les rares certitudes et permet de multiplier les fables, «scientifiques» et religieuses…
Notes
* Chroniqueur énervant.