Édito

Le bon droit des hommes du président

Majorité et opposition près du clash
Macron-Benalla: une proximité que le président assume. KEYSTONE
France

Le cas Benalla fait la une des médias français depuis une dizaine de jours. Alors que les critiques d’Emmanuel Macron pointent une «affaire d’Etat», les partisans du président dénoncent une agitation politicienne, montée en épingle par des médias désespérés par le manque d’actualité au cœur de l’été. Qu’en retenir?

Bien sûr, on ne parle pas ici du sabotage du «Rainbow Warrior» ni des «écoutes de l’Elysée». Mais le fait qu’un collaborateur «personnel» du président français se sente légitimé pour frapper allégrement des manifestants en portant, en marge de la légalité, des attributs de policier n’est de loin pas anodin. Et la gestion de cette affaire par les hautes sphères de l’Etat met en lumière de graves dysfonctionnements.

Le coup de projecteur sur Alexandre Benalla a d’abord démontré que, à l’instar de ses prédécesseurs, M. Macron, qui prônait une République «exemplaire», s’est lui aussi entouré d’une brigade parallèle. Pour faire le «sale boulot», selon les propres mots du désormais ancien homme à tout faire, lâchés dans Le Monde. Des séides propulsés dans les hautes sphères de l’Elysée, que personne ne contrôle vraiment. Des gens qui gèrent le quotidien du président, donnent des ordres, sans autre légitimité que d’être proches du chef. Et qu’on protège en haut lieu lorsque ce «pouvoir» leur monte à la tête. Du moins jusqu’à ce que ça se sache…

La réaction d’Emmanuel Macron à l’éclatement de l’affaire a mis en exergue sa vision ultra personnelle et verticale du pouvoir. En se déclarant bravache, seul responsable de tout, et attendant de pied ferme ses détracteurs, il s’est décrété unique chef à bord. Mais cela, devant sa cour, soit les membres de son parti. Et non devant l’ensemble des citoyens, ou du moins des élus. Alors que des hauts responsables de l’Etat ont, eux, dû donner des explications – même s’ils ont souvent louvoyé avec la vérité – devant le parlement, lors d’audiences publiques.

Mais au-delà de ces questions, le cœur du problème, soit le tabassage par Benalla de manifestants le 1er Mai, s’inscrit dans un moment politique particulier, qui l’a probablement encouragé. Nous soulignions en ce printemps 2018 à quel point ce gouvernement s’était lancé dans la confrontation face à la grogne sociale. Avec la répression pour principale réponse aux réclamations.

Quelques semaines auparavant, des milliers de CRS avaient délogé la ZAD de Notre-Dame-des-Landes. Et le gouvernement promettait de mettre au pas étudiants, cheminots, et tout autre contestataire de ses réformes libérales, avec comme étendards l’ordre et la sécurité. Dans ce climat, il n’est donc pas si surprenant que le porte-flingue du Jupiter de France se soit senti dans son bon droit d’aller lui-même casser du manifestant.

Opinions International Édito Gustavo Kuhn France

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