Une assemblée constituante au forceps
Venezuela
L’opposition vénézuélienne n’est pas parvenue à faire échouer le scrutin de dimanche, malgré une recrudescence des violences et des provocations, entraînant dix morts de part et d’autre. Le président Nicolás Maduro a ainsi réussi son pari de faire élire une assemblée constituante favorable au processus révolutionnaire bolivarien. Avec plus de 40% de participation selon les chiffres du Conseil national électoral, en dépit du boycott et des barricades empêchant les électeurs de circuler, le gouvernement pavoise. Est-ce pour autant un succès comme le clament les pro-Maduro et une partie de la gauche radicale latino-américaine et européenne? On peut en douter.
D’abord parce que la défiance générale semble désormais trop avancée au Venezuela. La crise politique et économique aiguë que traverse le pays depuis plusieurs années, aiguillonnée par la baisse drastique du prix du pétrole, émaillée par la corruption et des erreurs stratégiques des gouvernements Chávez et Maduro, a rendu la population lasse… très lasse. L’enthousiasme révolutionnaire n’est plus de mise.
Une nouvelle assemblée constituante, aussi efficace soit-elle, ne pourra résoudre ces problèmes en quelques coups de baguette magique. D’autant plus si l’opposition bourgeoise, qui détient des leviers essentiels de l’économie, continue à saboter l’approvisionnement des populations en biens de première nécessité et de favoriser l’inflation.
De surcroît, quelle légitimité aura cette nouvelle constituante née dans la violence? Boycottée par l’opposition, elle devra soit contourner le Parlement, où la droite est majoritaire, soit le destituer pour pouvoir adopter les mesures voulues par les secteurs progressistes. Deux mesures qui reviendraient à remettre en cause directement les élections législatives du 6 décembre 2015. Une telle politique donnerait davantage de grain à moudre aux accusations d’autoritarisme, auxquels le gouvernement a prêté le flanc à deux reprises récemment en bloquant l’an dernier le référendum révocatoire et en tentant d’utiliser le Tribunal suprême pour suspendre le Parlement…
De là à accuser Nicolás Maduro de «dictateur», il n’y a qu’un pas que le gouvernement de Donald Trump s’est empressé de franchir lundi. En Europe, des médias aux ordres des grands intérêts économiques entonnent la même chanson, n’hésitant pas à déformer les faits. L’utilisation par six grands journaux espagnols1 value="1">Dont El Mundo et ABC. de photographies de l’attentat à l’engin explosif lancé par des «manifestants» contre un groupe de policiers pour illustrer la violence du gouvernement Maduro en est une démonstration spectaculaire.
L’Espagne, le Mexique et la Colombie ont déjà déclaré qu’il ne reconnaissaient pas l’Assemblée constituante. L’Union européenne se tâte… Maduro a fait un pas de plus vers l’isolement.
Notes
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