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Sauver la cohésion sociale

«L’Hospice général n’est pas le malade, c’est le thermomètre de la société», résume Thierry Apothéloz, magistrat chargé de la Cohésion sociale. KEYSTONE
Précarité à Genève

C’est un paradoxe qui devient difficile à masquer: Genève est un canton immensément riche dont une partie importante de la population subit une précarité croissante. Alarmante, même, si l’on en croit les indicateurs. Ce n’est pas un secret, le niveau des primes maladie et des loyers au bout du lac est l’un des plus élevés de Suisse. Faire ses courses, placer ses enfants en crèche pèse aussi sur le budget des ménages. Résultat, le nombre de working poors prend l’ascenseur et un cinquième de la population vit sans épargne. A quoi s’ajoutent toujours plus de personnes aux poursuites et un surendettement endémique. L’accès des jeunes au marché du travail, lui, se heurte au niveau insuffisant de certification dans un environnement de plus en plus concurrentiel.

Pas étonnant que les besoins explosent. En 2026, ce sont 160 millions de francs supplémentaires – sur un total de 3 milliards – qui seront alloués à la cohésion sociale. Près de la moitié de cette somme répond à l’afflux de personnes qui sollicitent l’aide sociale. «L’Hospice général n’est pas le malade, c’est le thermomètre de la société», résume Thierry Apothéloz, le magistrat chargé de la Cohésion sociale.

Mais la droite, au vu des finances cantonales qui devraient plonger après des années mirifiques, grince des dents. Elle a pourtant voté la Loi sur l’aide sociale et la lutte contre la précarité (LASLP). En vigueur depuis le 1er janvier dernier, elle doit encore déployer ses effets – améliorer la détection des situations de pauvreté, simplifier l’accès aux aides, mieux accompagner la réinsertion en coordonnant tous les acteurs (institutionnels, économiques, associatifs). Ce n’est donc pas le moment de tirer le frein à main. Cette politique volontariste coûtera momentanément plus cher, mais c’est un mal pour un bien. Rappelons au passage, s’il le fallait, que la baisse d’impôts voulue par cette même droite, et acceptée par le peuple en novembre 2024, a contribué à assécher les finances, avec le résultat que l’on sait.

Ce constat est-il acceptable dans le paradis de l’horlogerie, de la finance et du trading? Dans un canton en tête des patrimoines, où résident plusieurs centaines de super-riches – des personnes disposant d’une fortune d’au moins 50 millions de francs – et une quinzaine de milliardaires, dont la plus grosse fortune de Suisse? Le partage des richesses est à repenser. Et dans l’immédiat, pour soulager les plus démunis, creuser la dette semblera une hérésie à certain·es, sauf si demain une majorité se résout à corriger le tir en augmentant la contribution des mieux lotis.

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