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Du violet sous la Coupole

A Berne, les revendications féministes passent mieux lorsqu’il y a une pression de la rue.
Dans un contexte de retour de bâton, les Femmes socialistes déposeront la semaine prochaine trois initiatives parlementaires, visant à modifier la Constitution pour y garantir les droits des femmes. Keystone-archives photo-prétexte
Grève féministe

La vague violette qui avait submergé le parlement fédéral lors des élections de 2019 semble bien loin. A l’heure où les fronts se crispent, le retour de bâton se fait sentir sous la Coupole. «On le constate dans les débats pour supprimer la rente de veuve ou encore pour astreindre les femmes au service militaire», observe Tamara Funiciello, conseillère nationale et coprésidente des Femmes socialistes. Autre sujet d’inquiétude, la récente décision de la commission de la sécurité sociale et de la santé publique du National de «flexibiliser le congé maternité et paternité» sans l’étendre dans le cadre d’un projet de congé parental. Les parents se partageraient à leur bon vouloir les 16 semaines actuellement inscrites dans la loi (14 semaines pour les mères, 2 pour les pères). «C’est une attaque terrible qui remet en question le congé maternité!» s’insurge Tamara Funiciello.

Les avancées sur le front des violences faites aux femmes ont été obtenues lors de la précédente législature, qui était encore teintée de violet: la ligne d’urgence téléphonique accessibles 24h/24 aux victimes de violences sera mise en œuvre en mai 2026 et une campagne de prévention contre les violences débutera en novembre cette année. «Aujourd’hui, il est nettement plus compliqué d’obtenir des majorités sur des sujets féministes. J’hésite davantage à déposer des interventions sur certaines thématiques, qui seront difficiles à faire passer», témoigne Tamara Funiciello. Dans un contexte de retour de bâton, les Femmes socialistes déposeront la semaine prochaine trois initiatives parlementaires, visant à modifier la Constitution pour y garantir les droits des femmes. L’une touche à l’autonomie financière, la deuxième au droit à disposer de son corps et la troisième à la protection contre la violence patriarcale.

«A gauche, il y a eu un avant et un après 2019. Les questions de genre sont davantage mises en avant dans les programmes des partis politiques» Solenn Ochsner

A droite, les Femmes PLR ont récemment donné de la voix, avec l’entrée en fonction de leur nouvelle présidente, Bettina Balmer. Leur nouvelle stratégie vise à se concentrer sur l’imposition individuelle, une uniformisation des déductions fiscales pour les enfants et l’augmentation de la visibilité des femmes PLR. «La politique en faveur des femmes n’est pas l’apanage de la gauche. Je connais beaucoup de femmes qui ne se laissent pas enfermer dans un rôle de victime et ne réclament pas sans cesse davantage de prestations gratuites de la part de l’Etat. Et pourtant, elles défendent avec cohérence l’égalité des droits», écrit la nouvelle présidente dans son communiqué.

Cette cristallisation n’est pas une bonne nouvelle pour le mouvement féministe. Alors que la gauche est toujours minoritaire sous la Coupole, elle ne peut obtenir d’avancées sans soutien à droite. «Les possibilités sont limitées. Soit nous cherchons des alliances, quitte à ce que les progrès obtenus soient moins importants que nos revendications, soit la pression de la rue est tellement forte que cela fait basculer les élu·es», analyse Tamara Funiciello. La mobilisation citoyenne a notamment changé le destin de la révision du droit pénal en matière sexuelle, qui améliore la protection des victimes. Sur les violences faites aux femmes comme sur les autres sujets, le travail de la Grève féministe est salué par l’élue. «Le mouvement est resté actif sur la durée et s’est fait une place dans le paysage tout en restant indépendant», relève-t-elle.

Au sein de la Grève féministe, on constate que la présence dans la rue a permis de faire bouger les mentalités, ce qui a atteint par ricochet le parlement. «A gauche, il y a eu un avant et un après 2019. Les questions de genres sont davantage mises en avant dans les programmes des partis politiques», observe Solenn Ochsner, militante de la Grève et secrétaire syndicale. Face au backlash et à la «pensée masculiniste débridée», le mouvement doit toutefois davantage défendre ses acquis et lutter contre des «violences parlementaires faites aux femmes», estime la militante. «Nous devons continuer à investir la rue. Dès que nous nous arrêtons de lutter, il y a un retour en arrière», conclut-elle.

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