Une victoire partielle, au goût amer, mais une victoire quand même. Après quarante-neuf ans passés dans une prison de haute sécurité malgré son innocence, Leonard Peltier devrait enfin sortir de sa cellule le mois prochain. Le militant de 80 ans, figure de proue de la lutte anticoloniale autochtone, sera libéré grâce à une décision de dernière minute de Joe Biden, soumis à la pression soutenue de nombreuses organisations. Souffrant, Peltier n’a pas été gracié mais pourra passer le temps qui lui reste à domicile.
Un geste humain qui intervient terriblement tard et jette une nouvelle fois en lumière l’injustice crasse dont Leonard Peltier a été et reste la victime: celle d’un procès politique, suivi d’un demi-siècle d’impéritie de la part de la justice étasunienne et de huit présidents, dont Barack Obama, qui se sont succédé sans lui accorder la grâce. Preuves fabriquées, faux témoignages, documents dissimulés, les irrégularités sont innombrables. Elles ont été documentées par des institutions très sérieuses et reconnues, dont Amnesty International et le groupe de travail des Nations unies sur les détentions arbitraires.
La violence du sort réservé à Peltier s’inscrit dans l’oppression impitoyable exercée contre les Premières Nations depuis le XVIIe siècle. Dépossédés de leurs terres, puis spoliés à nouveau par le non-respect des traités signés avec le gouvernement, les autochtones ont été assimilé·es de force jusqu’aux années 1960 et 1970, leurs enfants enlevés dans les horribles Indian Boarding Schools. Ecoles où Léonard Peltier a fait ses classes avant de se jurer de consacrer sa vie à la libération de son peuple.
Cette affaire jette un doute abyssal sur l’indépendance et le sérieux de la justice étasunienne, à l’heure où Donald Trump ne s’embarrassera pas, lui, des apparences. Dans un pays où près d’1% des habitant·es sont derrière les barreaux, constituant la plus grande population carcérale au monde, cela pose la question de l’équité de traitement dont bénéficient les condamné·es.
Sans compter que d’autres activistes sont emprisonnés à tort, comme l’Afro-Américain Mumia Abu-Jamal, enfermé depuis quarante-trois ans! Les afro-descendant·es constituent environ un tiers des détenu·es aux Etats-Unis. Un chiffre qui s’explique en grande partie par l’héritage de plus de deux siècles d’esclavage et les disparités que celui-ci engendre dans une société ultra-capitaliste.
Les Etats-Unis ne pourront emprunter un chemin libéré de la violence sans prendre la mesure de leur histoire coloniale et esclavagiste. C’est la voie contraire qui est choisie avec Trump.