Le peuple suisse ne revotera pas sur la question du relèvement de 64 à 65 ans de l’âge de la retraite des femmes. Le Tribunal fédéral (TF) a rejeté jeudi une série de recours contre la votation de septembre 2022.
Des actions en droit motivées par le caractère erroné des informations fournies par le Conseil fédéral durant la campagne: le déficit futur de l’AVS avait été alourdi de plusieurs milliards de francs.
Las. Les juges ont unanimement refusé d’annuler la votation. Ceci au nom de la sécurité du droit, certaines mesures, comme le relèvement de la TVA, étant déjà en vigueur. On constatera que le conservatisme juridique pèse donc plus lourd que le sort de milliers de femmes lésées par ce relèvement de l’âge de la retraite. La déception des recourantes et de leur avocat·es est légitime.
On relèvera ensuite l’attitude que l’on peut qualifier de pétocharde des juges. Ils ont certes tancé la légèreté du Conseil fédéral dans ses méthodes de communication, sinon manipulatrices du moins nonchalantes. Mais ils ont refusé de statuer sur la gravité de ces pratiques. C’est pour le moins regrettable, cette manière de faire semble pourtant devenir une mauvaise habitude. La Confédération avait déjà induit le peuple et même les cantons en erreur lors de la votation sur la deuxième réforme de l’imposition des entreprises en 2008. L’impact de la réforme avait été estimé à quelques dizaines des millions de francs; à l’arrivée l’ardoise s’est montée à plus de 7 milliards sur dix ans. Là-aussi, le TF avait argué de la sacro-sainte sécurité du droit… Et on a vu, lors du récent vote sur les autoroutes, qu’une certaine tendance à la rétention d’informations ne semble pas gêner le très populiste Albert Roesti.
Il était sans doute un peu téméraire d’espérer qu’une instance par nature conservatrice comme l’est le TF défasse ce que les Chambres fédérales avaient concocté. Le combat est bien politique. Même si le rapport de forces est inégal. Le clivage des genres qui s’était manifesté lors de la votation contestée doit être pris en compte. Les femmes paieront la réforme de l’AVS alors qu’elles touchent des pensions de 30% plus basses que les hommes.
L’égalité entre hommes et femmes garantie par la Constitution n’est toujours pas respectée, non seulement à la retraite mais tout au long de la vie. Il est essentiel de redoubler d’efforts. Pour les retraites, il s’agit maintenant de mieux prendre en compte les tâches éducatives, le travail de soins et le temps partiel.